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101e km
13 novembre 2021

Où il y a les gènes, y a pas de plaisir

Si qu’on reparlait de la tempête Xintia ? C’était il y a 11 ans et nous avions attiré l’attention sur la mentalité qui avait conduit à la catastrophe. À l’époque, nous avions souligné que dans l’imaginaire collectif de nos pays industrialisés, éduqués et modernes, ce type d’événement est tout simplement inenvisageable. On croit que le niveau d’éducation et d’équipement dissuade la nature de s’en prendre à nos territoires et à nos personnes. Avec la pandémie actuelle, on voit qu’il n’en est rien, même en termes de santé publique mais il n’est pas certain que pour ce qui concerne ce qu’on appelle les « catastrophes naturelles », on ait revu notre manière de voir. Jusqu’à présent, on admetait que la pauvreté et le faible taux d’alphabétisation étaient les causes de ces catastrophes.

Un autre point à souligner était l’oubli. Après avoir entendu pendant des jours, les victimes se lamenter sur leurs biens inondés, sur parfois le sacrifice d’une vie de labeur pour se payer une maison en bord de mer, on a vu les mêmes se rebiffer dès qu’il a été question de démolir puis de reloger plus loin ; plus loin de la mer. On n’allait quand même pas perdre la maison qu’on avait eu du mal à payer pour être face à la mer, pour un peu d’eau qui a abîmé le canapé et les meubles. Ça n’arrive pas tous les an non plus. Malgré tout, l’article https://www.20minutes.fr/societe/2727911-20200227-dix-ans-tempete-xynthia-abri-nouvelle-catastrophe

nous apprend que, comme à son habitude, l’administration n’a pas fait dans le détail : tout ou rien. On prend pas le risque de s’entendre reprocher, en cas de récidive, d’avoir laissé de pauvres gens se faire inonder au lieu de les mettre à l’abri plus loin.

 

Pourtant, ce n’est pas ça qui retient notre attention mais une phrase prononcée par le maire qui avait pris la succession de celui qui avait autorisé les constructions : « Il me semble que la compréhension du risque littoral et fluvial est entrée un peu plus dans les gênes des responsables publics. »

 

On passera outre la faute d’orthographe monumentale (gènes) car à l’heure où 80 % des candidats obtiennent le baccalauréat en faisant en moyenne une faute par ligne, on n’en est plus là. On a trouvé la parade avec le « grand-oral » sur un sujet choisi par le candidat lui-même. Nous en avons parlé largement. En revanche, il est intéressant d’observer, depuis près de 20 ans, comment les progrès dans la connaissance de la génétique ont influé le vocabulaire courant. Les Français adorent se payer de mots. Ils se repaissent des mots anglais qu’ils découvrent petit à petit. Il y a une trentaine d’années, ils ont découvert « live » sur les images des télévisions anglophones et depuis, « en direct » est remplacé par « en live » voire « en direct live ». Les dernières trouvailles sont « spoiler » , « fake » et donc « fake-news ». On attend avec impatience les prochaines.

 

Les découvertes sur l’ADN ajoutées à l’exposition des maladies génétiques et au Téléthon permettent à n’importe qui d’employer des mots et expressions longtemps réservées aux spécialistes les plus pointus. C’est à peine si les manuels scolaires de biologie (= SVT) les mentionnaient. ADN et ARN demeuraient peu accessibles aux bacheliers même aux titulaires de l’ancien bac D auxquels ils fournissaient néanmoins de bonnes bases pour la suite. Maintenant, tout le monde les emploie : « c’est dans notre ADN », « c’est dans l’ADN de notre entreprise ». À l’heure où les notions de « sens propre » et « sens figuré » ne sont plus maîtrisées, où la notion de degré de plaisanterie est plus qu’ambiguë, tout le monde jongle, et avec quelle facilité, avec celles de gènes et d’ADN. Au passage, on a quelque peu délaissé les chromosomes, pourtant fondamentaux. On les retrouve un peu dans des discours féministes. Ce qui est étonnant, c’est que cet ancien élu, dont on peut supposer qu’il possède au moins une instruction secondaire, considère que la prise en compte du risque de catastrophe naturelle, de la montée des eaux, relève des gènes. Pour le dire autrement, l’usage intempestif de ces expressions à la mode ignore totalement le rôle du cerveau et donc de l’apprentissage, de l’éducation. Pour le dire encore autrement, c’est la négation de l’intelligence. Nous en sommes arrivés à un tel point que la mention de l’intelligence est bannie. Elle insinuerait qu’il existe des différences entre les individus, que chacun n’aurait pas eu les mêmes possibilités d’apprentissage et surtout de développement de cette intelligence. Ça remettrait en cause beaucoup de choses. Pour le dire simplement, d’une part une certaine inégalité à la naissance et surtout une inégalité certaine après le passage dans les institutions en charge de l’instruction. En choisissant d’attribuer aux gènes le mérite de la prise de conscience des risques, on s’épargne une réflexion qui devrait conduire à permettre au plus grand nombre d’accéder aux savoirs et pas seulement à la connaissance de quelques termes, plus ou moins bien orthographiés d’ailleurs. En même temps (!), on suggère qu’on s’y connaît, qu’on est capable de décoder la structure hélicoïdale de l’ADN, au point de repérer, en tout cas, où se trouve la prévention des risques de catastrophe naturelle. C’est comme ça qu’on peut prétendre être intelligent ; et la boucle est bouclée.

 

 

On relira :

La tempête Xinthia est passée

Diplômes Nettement en Baisse (DNB)

 

https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-adn-87/

 

ADN

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