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101e km

26 avril 2024

Moins on écoute, plus on écoute.

Pourquoi se fatiguer à commenter le résultat de l’audience des radios puisque depuis près de 20 ans, c’est toujours la même auto-satisfaction affichée par les stations concernées, quel que soit le résultat ?La pensée positive impose de trouver un biais par lequel on a tout lieu de plastronner. Il suffit de taper « audience radio avril 24 » sur un moteur de recherche pour avoir un aperçu de l’imagination déployée par les groupes de médias pour prouver que chacun est le 1er. C’est édifiant. Et voici que la chronique des médias d’Inter, « 1ère radio de France », nous dérange encore :

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-media/l-edito-medias-du-jeudi-25-avril-2024-1232679

L’éminent chroniqueur, M. Cyril Lacarrière nous informe que la durée d’écoute de la TV baisse chaque année : - 15 mn entre 2022 et 2023 et encore - 7 mn l’an dernier (2023). Plus inquiétant peut-être, en 10 ans, la consommation de TV des ados a baissé de moitié… Quant à la radio : toutes stations confondues, elles ont perdu +1 million d’auditeurs en 2023. Malgré tout, Médiamétrie rend son verdict régulier : https://www.mediametrie.fr/system/files/2024-04/2024%2004%2018%20CP%20EAR%20National%20Janvier-Mars%202024.pdf

Nous nous contenterons ici d’utiliser le résumé de https://www.20minutes.fr/arts-stars/medias/4087067-20240418-audiences-radio-france-inter-reste-largement-tete-rtl-patine-europe-1-poursuit-remontada

France Inter, la radio la plus écoutée de France depuis 2019, conserve (largement) son statut et bat même son record historique avec 7,18 millions d’auditeurs quotidiens de janvier à mars 2024, selon les chiffres publiés par Médiamétrie ce jeudi 18 avril 2024.

La radio publique généraliste gagne ainsi 144.000 auditeurs quotidiens sur un an pour atteindre une audience cumulée de 12,8 % (+0,2 point). « Les Français n’ont jamais été aussi nombreux à écouter Inter : 7.180.000 auditeurs chaque jour, c’est un record absolu en radio ces vingt dernières années »

L’article poursuit en indiquant que la PDG de Radio-France, Sibyle Veil, a salué les performances de l’ensemble des radios du groupe public qui progressent aussi ! Si l’on ajoute que les animateurs d’Europe1 passent leur temps à saluer les auditeurs, de plus en plus nombreux à écouter chacune de leurs émissions, et qu’RTL proclame avec une belle assurance qu’elle demeure la 1ère radio de France, on ne peut que conclure que l’audience des stations de radio généralistes n’en finit pas d’augmenter. Comme nous l’écrivions précédemment, elle est même extensible. Ça n’a pas perturbé M. Lacarrière quand il s’appuie sur une étude tout aussi sérieuse, montrant qu’on écoute de moins en moins la radio, d’une façon générale.

Rappelons, une fois de plus, comment est mesurée l’audience. Pour cela, citons https://www.ouest-france.fr/medias/television/television-radio-replays-podcasts-comment-sont-calculees-les-audiences-on-vous-repond-7007cbe2-6c28-11ee-8fa0-55979078a607

Médiamétrie procède à des interviews téléphoniques. 100 000 interviews sont réalisées auprès de la population âgée de 13 ans et plus, et réparties sur 10 mois de septembre à juin, dimanches et jours fériés compris. Les personnes sont interrogées entre 17 h 30 et 21 h 30 sur leur téléphone fixe ou téléphone mobile. Il est alors possible de connaître l’audience moyenne d’une journée pour une station, l’audience par tranche horaire, sur plus de 250 cibles, la part d’audience d’une station et la durée d’écoute par auditeur. Et les résultats sont publiés quatre fois par an.

Pour le dire autrement, on interroge 100 000 personnes et l’on en déduit que + 7 millions écoutent Inter et presque autant écoutent RTL. Pour les autres, ce sera un peu moins mais finalement presque autant chacune. C’est pas sérieux. Qui connaît 1 seule personne dans son entourage, sa famille, ses collègues et amis à avoir été interrogée 1 seule fois en 10 ans ? Et quand bien même : 100 000 personnes sur près de 68 millions d’habitants, ça n’est pas vraiment significatif. D’autant plus que ne répondent que ceux qui écoutent un peu la radio.

 

À ce stade, nous ne résistons pas à publier des extraits de précédents articles sur le même sujet.

Mardi 14 janvier 2020, Alex Wizorek commente les résultats d’audience des radios et s’étonne que, pour la période où l’antenne a été perturbée par un mouvement de grève, Inter ait gagné près de 500 000 auditeurs. (…)

Pourtant, l’essentiel n’est pas là. Depuis que nous commentons les résultats d’audience de la radio, nous soulignons l’incohérence entre les succès des radios généralistes et le fait que les générations d’adolescents et de leurs parents – ça fait du monde quand même – ignorent jusqu’au nom de ces stations. C’est pas tout à fait logique. De plus, nous avons commenté, il y a peu, des études qui montrent qu’on écoute de moins en moins la radio.

Or, Alex Wizorek fait état de près d’un demi million d’auditeurs en plus. Est-ce à dire, alors qu’on écoute moins la radio mais que ceux qui l’écoutent se concentrent sur Inter dont ils ignorent le nom ? Soyons sérieux !

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2020/01/15/37942627.html

Nous écrivions aussi, en décembre 2011 :

 En progression, RTL ? Est-ce à dire qu'elle pique des auditeurs à ses concurrentes ? Nenni, puisque les autres progressent aussi ou se maintiennent à peu près. Il faut en déduire que les auditeurs forment un ensemble extensible qui progresse à chaque sondage.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/12/03/22873206.html

 

Rien n’a changé. Tous les 4 mois, c’est pareil ! Chaque station proclame haut et fort qu’elle progresse, voire qu’elle est en tête sur un segment quelconque. Ça fait plaisir à l’auditeur qui se demande parfois s’il a fait le bon choix. Non Jeff, t’es pas tout seul.

 

 

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19 avril 2024

Notre-Dame 5 ans après

Il y a donc 5 ans, la toiture de Notre-Dame de Paris prenait feu en suscitant une vague d’émotion exceptionnelle. Sur les plateaux de télévisions ou même d’émissions de radio, les invités voyaient les écrans d’information continue et ne pouvaient réprimer des cris de stupeur devant les premières images. L’auditeur aguerri sait reconnaître les émotions que seule la radio peut restituer. On sentait que quelque chose de très grave se passait. Rapidement, M. Stéphane Bern, nouveau défenseur médiatique des chefs-d’œuvres en péril, trouvait les mots adaptés à l’événement : « C’est une forêt qui a brûlé ». Dans les heures, les jours qui ont suivi, les millionnaires de France et même du monde annonçaient leur intention de donner des sommes en rapport avec le sinistre. Le Président de la République, M. Macron, a dû intervenir et a surtout pris l’engagement de réparer les dégâts. Surtout, il a fixé un calendrier jugé à l’époque impossible à tenir : 5 ans, pour que Notre-Dame soit encore plus belle !

 

Inutile de rappeler les étapes que tous ceux qui suivent le dossier connaissent plus ou moins. Ce qui nous paraît plus intéressant à notre niveau, c’est d’étudier l’évolution des mentalités. D’abord, l’émotion a été sans précédent et c’est naturel, dans la mesure où il n’y a pas de précédent. De toute façon, personne en vie n’a connu pareille destruction, même partielle. La destruction a rappelé aussi que la France est un vieux pays et même un très vieux pays et donc, possède un patrimoine en rapport. Notre-Dame de Paris est presque aussi vieille que la France et c’est cela que la plupart d’entre nous a perçu. Un peu de notre passé français partait en fumée. La réaction a été à la mesure. Sur environ 200 pays reconnus ou pas, une bonne centaine n’existait pas en 1900 ou pas depuis longtemps. Leur patrimoine est celui laissé par d’anciennes civilisations, parfois vaincues par les ancêtres de ceux qui président aux destinées actuellement. Peu de pays existent depuis plus de mille ans, plus ou moins dans les frontières actuelles, ou ont perduré sous le même nom malgré les vicissitudes de l’Histoire. La France est de ceux-ci et l’effondrement d’une flèche sur une toiture en flammes donnait l’impression que c’était une partie de la France qui disparaissait dans le feu. Pourtant, dans le même temps, on voyait que des pompiers compétents, limitaient les dégâts et que le chef de l’État assumait son rôle en rassurant sa population. Les pays les plus anciens du monde sont presque tous des monarchies. C’est dans ces circonstances qu’on mesure à quel point notre République est davantage une monarchie élective, et que la population française a besoin d’une figure pour l’incarner ; au contraire du fédéralisme anglo-saxon, par exemple. Parmi les plus vieux États, la pompe républicaine française n’a rien à envier à celle de la royauté anglaise, autre vieux pays.

 

Pourtant, cette prise de conscience n’a pas plu à tout le monde et des jeunes, ainsi que ceux qui prétendent les défendre, ont cru bon de moquer cette France attachée à ses vieilles pierres. On a plutôt eu l’impression que cette frange de la population, habituée à obtenir tout ce qu’elle exige, que ce soit dans le cadre familial (quand il y en a encore un) ou dans l’espace public où l’on pratique depuis longtemps la culture de l’excuse systématique, sentait que quelque chose lui échappait. D’où les propos un peu provocateurs de certains, amplifiés par ce qu’on appelle « les réseaux sociaux ». On avait observé la même réaction, mais plus silencieuse, lors de l’émergence des gilets-jaunes qui rappelaient que des sommes considérables avaient été affectées en pure perte aux populations suburbaines tandis que le reste de la France, notamment rural, était exclu de tout et perdait ses médecins et ses services publics. Cet incendie d’un édifice patrimonial, situé dans la capitale d’un pays aussi centralisé que la France, n’a pas rappelé à la jeune génération que la France n’a pas été construite par leurs parents ni leurs grands-parents ; puisqu’ils ne le savaient pas. Ils l’ont découvert brutalement et ont du mal à l’accepter. C’est sans doute la meilleure preuve de l’échec de notre système scolaire depuis des années : l’incapacité à transmettre une culture, un patrimoine et même une langue. Les expérience pédagogique pratiquées sur des élèves cobayes ne sont pas les seules raisons. Le patronat qui exige des jeunes formés à leurs exigences, en dehors de toute considération humaniste, est au moins autant coupable. L’européisme qui nie les nations contribue également à l’oubli de la culture de chacune des composantes de l’UE. C’est ce que les Européens expriment quand ils méprisent leurs billets de banque qui proposent des dessins neutres d’édifices qui n’existent pas, afin d’effacer de la mémoire collective, l’histoire des nations, sans rien proposer à la place. On a réussi à imposer des pièces de monnaies qui commémorent quelque chose dans chaque pays. Pourquoi ne verrait-on pas des billets représentant, par exemple les jardins du Generalife à Grenade ou même Notre-Dame de Paris, se promener à l’autre bout de l’Europe ?

En même temps qu’une prise de conscience d’histoire et de patrimoine, on a vu resurgir les vieux démons de la France ; et notamment une administration incapable de créer pour s’adapter mais arc-boutée sur des règlements. D’ailleurs, le Président de la République a nommé un général d’armée pour coordonner l’ensemble du projet. On ne pouvait être plus clair. On a rappelé à juste titre les grandes étapes de la constructions de Notre-Dame, en insistant sur la restauration due à Viollet-le-Duc mais, au lieu d’annoncer une nouvelle étape – car un édifice, quel qu’il soit, évolue – on a proclamé qu’il fallait reconstruire à l’identique et appliquer la convention de Venise dont la France est signataire, bien sûr. Autrement dit, pas question d’adapter la reconstruction avec les techniques modernes, d’employer des matériaux composites, légers et encore moins de poser des tuiles photovoltaïques. Pourtant, nombre de bâtiments parmi les plus remarquables et les plus beaux, affichent des styles différents selon la durée des travaux. Soit on voulait profiter de ce qu’on avait appris (par exemple briser l’arc des fenêtres pour plus de portance et de lumière), soit on ne savait plus faire comme on faisait avant. Le Moyen-Âge a duré un millier d’années et la Renaissance puis le monde moderne, quelques siècles encore. On a eu le temps d’apprendre et d’oublier et surtout de perfectionner. Notre époque sait tout faire et invente encore. Il est déplorable qu’on ait choisi d’arrêter le temps à la période de Viollet-le-Duc. Justement, l’Histoire a retenu son nom parce qu’il a restauré un patrimoine qui tombait en ruine mais aussi parce qu’il a pu imposer sa patte. Les fameuses gargouilles, monstrueuses, et l’élégante flèche de Notre-Dame sortent de son imagination. On aura beau poser une stèle sur la cathédrale parisienne reconstruite, avec les noms du général, de son successeur, de l’architecte et de quelques autres, ils n’entreront pas dans l’Histoire. À Vézelay, premier chantier de Viollet-le-Duc, on a posé des arcs boutants à un édifice roman qui n’en possédait, bien évidemment pas. Moyennant quoi, la basilique de la Madeleine tient debout et attire toujours plus de visiteurs. À Lyon, on ne parle plus que de « l’opéra Jean-Nouvel » depuis que cet architecte de renom a repensé et transformé l’édifice qu’il était chargé de restaurer. C’est la population qui, spontanément, a donné son nom à cet élément de leur patrimoine. Bien sûr, ça dépasse les seuls amateurs d’opéra, jamais bien nombreux. Les Chinois ne disent-ils pas que la façade d’une maison appartient aux passants et pas à son propriétaire ?

 

L’obligation de positiver nous fait admirer la reconstruction de la charpente en chênes provenant de forêts de tous les Départements français. L’idée n’est pas mauvaise en soi mais qui le sait ? Bien sûr, la presse régionale n’a pas manqué de montrer les beaux chênes qui allaient être abattus par des bûcherons locaux après avoir été choisi par les cadres du chantier, venus exprès de Paris. Ne nous faisons pas d’illusion. Les lecteurs n’ont pas été davantage impressionnés que par celles de l’élagage annuel sur la place principale de leur chef-lieu ou sur la route nationale. Et puis, M. Bern qui se lamentait sur la forêt qui venait de brûler comme charpente de Notre-Dame pourrait aussi se lamenter qu’une deuxième forêt soit sacrifiée moins de 5 ans après l’autre. Pourtant, on n’a pas éprouvé les mêmes sentiments pour ces chênes qu’on a abattus alors qu’on pouvait faire autrement. On a pourtant rappelé que pour reconstruire les cathédrales de Chartres et de Reims, au siècle dernier, on avait eu recours à l’acier et au béton, sans que personne ne s’en aperçoive. On a écarté l’argument d’un revers de la main. On a préféré filmer les forestiers, fiers d’offrir des arbres de chez eux pour reconstruire Notre-Dame. Notre époque privilégie toujours l’émotion sur la raison. C’est ainsi que la flèche, reconstruite à l’identique, est couverte de plomb, qu’on qualifie, pour couper court à toute critique, de « matériau noble », seul digne de participer à la restauration. Pourtant, depuis des décennies, on enlève le plomb partout où c’est possible. On est parvenu à l’éliminer des peintures et des carburants. Voilà qu’on en remet une couche sur la cathédrale. On a même imaginé un système de récupération des eaux de pluie ruisselant sur la flèche afin de ne pas polluer la Seine. Pourquoi faire simple quand on peut compliquer. Pour faire avaler la pilule plombée, outre la noblesse du matériau, on met en avant les qualité de ce métal et le savoir-faire de ceux qui le manipulent. On a vraiment les meilleurs ouvriers du monde et forcément les plus intelligents ; surtout ceux qui donnent les ordres !

 

Bien sûr, tout le monde se réjouit de la remise en valeur des peintures, du nettoyage des vitraux et des marbres, du sablage de la pierre. On admire la minutie des peintres, travaillant avec des tout petits pinceaux. On se réjouit d’entendre à nouveau les grandes orgues, lorsqu’on aura reposé les tuyaux, nettoyés, et accordé l’instrument. Nul doute que ça donnera lieu à une cérémonie retransmise sur les téléviseurs du monde entier. Ce sera l’apothéose et ne boudons pas le plaisir de cet événement. On éprouvera quand même un pincement au cœur en pensant à tout ce qui aurait pu être réalisé. On préférera ne pas penser aux promesses de dons. Ne doutons pas de leur sincérité mais la question est de savoir comment ils seront utilisés ; s’ils le sont.

 

 

1 février 2024

John GUEZ dernière

John GUEZ, ce nom est familier aux habitués de mes blogs car j’en ai parlé quelques fois. Je le tiens pour le Dario Fo français. Pourtant, au contraire de son homologue italien, il est tombé dans l’oubli et surtout, il n’a jamais obtenu le Prix Nobel.

Je pèse mes mots. John Guez, dès l’ouverture du Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou (CNAC), en 1977, que tout le monde appelle « Beaubourg », il a animé le parvis juste devant. On ne redira jamais assez que Beaubourg a été un succès dès le début et que le nombre de visiteurs a dépassé de très loin les prévisions les plus optimistes. La raison tient aussi à l’animation qu’il y avait sur le parvis, réunissant saltimbanques, cracheurs de feu (dont le futur directeur du Cirque du Soleil), mimes, automate, théatreux… On y croisait aussi Mouna Aguigui qui avait quitté son Quartier Latin, pressentant que Beaubourg deviendrait l’épicentre de la vie culturelle de son temps.

 

john guez

Dans cet environnement bouillonnant et joyeux, John GUEZ, toujours coiffé d'un chapeau, sa marque de reconnaissance, interpelait les badauds et leur faisait jouer un rôle dans une scène de théâtre, connue ou moins connue. C’était drôle. Mine de rien, il amenait le théâtre à des gens qui en étaient éloigné et il prouvait à tous que le théâtre est vivant et que tous y ont accès. Le théâtre est l’art du peuple par excellence. C’est pas vraiment l’idée qu’on en a en lisant les critiques de pièces et en écoutant ce qui se produit chaque année au Festival d’Avignon. On relira ce que j’ai écrit sur Guy Rétoré qui dirigeait et animait un vrai théâtre populaire dans le XXe arrondissement de Paris, il y a… plusieurs années aussi. Le Théâtre de Ménilmontant (où a débuté G. Rétoré d’ailleurs) s’inscrit dans la même veine mais connaît des difficultés dues, notamment, à la pression immobilière. Le lieu appartient à la paroisse catholique de Ménilmontant qui a du mal à l’entretenir et effectuer des travaux. Y a pas que les agriculteurs qui doivent se plier à des normes parfois rédhibitoires.

John GUEZ, peut-être plus encore que Guy Rétoré, réalisait un vrai travail de culture et d’éducation populaires. John Guez montrait que tout le monde pouvait faire du théâtre, pouvait s’immerger et participer, même et surtout sans préparation ni démarche. Guy Rétoré s’acharnait à apporter un peu de beauté aux gens du peuple des quartiers populaires de l’Est Parisien ; allusion à son TEP, Théâtre de l’Est Parisien.

 

Chapeau (bas), John GUEZ !

 

 

Correlats :

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/05/16/17909043.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2020/02/17/38033770.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2018/12/25/36967415.html

 

et encore :

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2019/01/05/36992549.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/05/31/18064125.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2007/12/02/7074899.html

 

bravo et merci au site https://actu.fr/paris/

https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/paris-un-hommage-a-john-guez-le-saltimbanque-de-beaubourg-ce-dimanche_60149160.html

 

dont on relira aussi l’article consacré à Azzouz qui connaissait John Guez mais n’avait plus de nouvelles

https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/portrait-m-hamed-azzouz-dernier-marchand-de-journaux-de-belleville-a-paris_45177718.html

 

http://101ekm.canalblog.com/archives/2021/10/01/39159168.html

 

 

 

8 janvier 2024

M6 joue au casino

 

D’habitude, nous commentons l’audience des stations de radio mais, justement, en écoutant

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-media/l-edito-medias-du-lundi-08-janvier-2024-5315710

notre attention a été attirée par le recul de celle d’M6. Or, dans le même temps, l’article que nous lui consacrions, quoi qu’ancien, a fait l’objet de plusieurs visites au cours des derniers jours

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2018/06/10/36475227.html

 

M6 - Finance_Informations_Générales_V2À l’époque, nous nous interrogions sur la prise de contrôle d’une grande station de radio française et européenne par une petite chaîne de TV strictement française et longtemps confidentielle. Notre déduction portait sur les opérations financières à l’origine de cette manœuvre faussement médiatique. Depuis 2018, date des faits, nous savons qu’il s’agissait en effet, de finance puisque la finalité consistait à valoriser M6 dans le but d’une revente à venir. Il a fallu les 2 années de tractations entre le groupe Bouygues, propriétaire de TF1, et M6, depuis 2021, pour que les choses soient presque claires. Seul le capital d’M6 et son devenir intéressent les financiers. Le contenu médiatique et même le support n’ont que peu d’importance. Ce qui fait dire à M. Cyril Lacarrière  : « Voilà le problème. Les patrons de M6 pensent de plus en plus à faire du business et de moins en moins à faire de la télé. ».

D’une manière générale, les financiers sont tellement obnubilés par les opérations boursières, les prises de capital, les reventes d’actions, qu’ils en oublient l’activité des entreprises dans lesquelles ils investissent. Finalement, il arrive à M6 ce qui vient d’arriver au groupe Casino dans la distribution. Depuis que la famille fondatrice, les épiciers Guichard, ont cédé leurs parts, les financiers ont passé plus de temps à conforter le capital, à restructurer qu’à vendre de l’épicerie et des biens de consommation. Ça a mis du temps mais Casino est en faillite et revend ses magasins à la découpe et à ses concurrents. La grande distribution en supermarchés est en baisse depuis le début du siècle, concurrencée notamment par la vente en ligne. Justement, l’audience de la télévision est aussi en baisse, concurrencée par les plateformes en ligne. Les mêmes causes produisent les mêmes effets.

 

M6 groupeFidèle à notre vocation de mémoire des médias, rappelons à la suite de M. Lacarrière que pendant longtemps, le slogan d’M6 était « La petite chaîne qui monte ». C’était au début et pour se distinguer des autres, M6 diffusait des clips pour se conformer plus ou moins à son cahier des charges qui stipulait que la chaîne devait s’adresser aux jeunes, à la suite de TV6. Également, M6 tâchait d’innover ou de montrer ce qu’on ne voyait pas ailleurs. On a même vu Pierre Bouteiller adapter son fameux « Magazine » sur un plateau de télévision, avec le même indicatif de Neal Hefti. Et puis, la fameuse 5 de Berlusconi, transposée en France par les soins du groupe Hersant a fini par jeter l’éponge. Aussitôt, M6 a repris ce qui avait fait son relatif succès : rediffusion de séries amorties, ce qui coûte bien moins cher que de payer la création et fait davantage plaisir à ceux, à celles surtout, qui doivent rester à la maison dans la journée. C’est le succès de cette formule qui a installé M6 dans le PAF et lui a permis d’investir dans les émissions qui ont conforté sa réputation et permis la constitution d’un groupe avec l’acquisition de Paris-Première notamment. Maintenant, ce n’est plus qu’une histoire de gros sous. Les déboires de Casino ont commencé quand une agence de notation a suspecté la valeur du groupe d’être surévaluée. M6 dont la notoriété n’a jamais dépassé les limites de l’hexagone pourrait connaître la même mésaventure après la publication de son recul d’audience.

 

La synthèse des résultats se trouve notamment sur https://www.strategies.fr/actualites/medias/LQ2740815C/les-gagnants-et-les-perdants-des-audiences-tv-en-2023.html

 

À noter que nous avons emprunté les illustrations sur la page « finance » https://www.groupem6.fr/actualites-finance/ et non sur une page de médias.

 

20 décembre 2023

Claude Villers et le métier de journaliste

 

Inévitable dans ces cas-là mais depuis l’annonce de sa mort, les commentaires dithyrambiques et extravagants s’accumulent. Comment en serait-il autrement quand on évoque un homme qui a travaillé à la radio quand elle pouvait encore concurrencer la TV. On insiste lourdement sur Desproges, comme s’il avait co-produit ou eu l’idée du « Tribunal des flagrants délires ». Desproges avait été viré de « La lorgnette » (suite du « Petit rapporteur ») par Jacques Martin mais il était demeuré populaire, d’où son engagement par Claude Villers qui s’en est séparé à son tour, non sans avoir précisé qu’il avait fait preuve de patience. Or, le « Tribunal » n’a duré que 2 saisons. Jamais plus Desproges ne travaillera avec un professionnel.

Screenshot 2023-12-20 at 22-20-32 Adieu Claude Villers Gonzo MusicEnsuite, Le Monde, toujours très sûr, avance : « A New York, il renoue d’abord avec la presse écrite, couvrant pour des magazines français l’effervescente scène culturelle et musicale de l’époque, de Bob Dylan au Grateful Dead. Puis, il est embauché au bureau new-yorkais de l’ORTF, sous la direction de Jacques Sallebert. Il sillonne pendant trois ans l’Amérique du Nord, relatant les premières révoltes étudiantes en 1968, l’assassinat de Martin Luther King, le festival de Woodstock en 1969… ». Ailleurs, toujours empruntant un raccourci étonnant, on nous affirme que, correspondant à New-York en 1969, il avait couvert l’aventure Apollo XI. Rien n’est plus faux ! À l’époque, Jean-Claude Héberlé était correspondant à Washington et c’est lui qui intervenait le plus quand il se passait quelque chose là-bas. Pour Apollo XI, les radios de l’ORTF avaient dépêché Michel Forgit sur place et peut-être déjà Pierre Salviac qui s’endormira en direct à l’antenne pendant l’odyssée dramatique d’Apollo XIII. Jean-Claude Bourret était de la partie car il fallait un coordinateur à Paris, ainsi que Lucien Barnier, le chroniqueur scientifique de la station. Facile à vérifier, surtout quand on travaille à la source. Il faut plus de temps avec les moteurs de recherche mais on trouve comme par hasard : http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2012/08/26/24968310.html

et sinon, à la source : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/mythologie-de-poche-de-la-radio-multidiffusion/operation-radio-terre-la-conquete-de-la-lune-michel-forgit-jean-claude-bourret-2952096

https://www.radiofrance.fr/franceinter/1969-annee-lunatique-9733259

 

Facilités journalistiques

Surtout, ça en dit long sur la manière de travailler des journalistes. À partir de quelques dates, puisque Villers se trouvait à New-York en 1968 et 1969, on en déduit qu’il a couvert l’assassinat de Martin Luther King Jr., Woodstock et le premier (puis le deuxième) homme sur la Lune. Comme s’il n’y avait rien avant lui et rien à côté de lui à ce moment. Ça rappelle comment dans feu L’Événement du Jeudi, après la sortie du morceau de The Cure « Killing an arab », on s’était répandu sur ce groupe qui citait « abondamment » Camus. Tout ça pour alléguer que la jeunesse du moment était conscientisée et cultivée puisque plébiscitant les chansons où les philosophes sont mentionnés. À pareille école de journalisme, cette génération qui écoutait The Cure se permet de dire que Villers « va commenter au micro deux événements devenus mythiques, les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune, et les concerts de Woodstock » (in Le Figaro). À partir de là, comment faire confiance à ceux dont c’est le métier d’informer mais aussi de vérifier l’information ! Concernant la vie de Villers, ça n’a pas trop d’importance mais on peut raisonnablement penser qu’il en est de même pour les événements de dimension mondiale. C’est d’autant plus préoccupant que ces 2 titres sont des références de la presse française actuelle ; même si Le Monde n’est plus ce qu’il a été, depuis longtemps maintenant. De plus, s’il n’est pas toujours facile de vérifier l’information sur le moment, il est très facile de le faire quand on parle d’événements passés. Villers était bien aux É-U à ce moment-là mais ce n’était pas lui qui intervenait à l’antenne. D’ailleurs, quand il se passe quelque chose d’extraordinaire, le correspondant sur place est surtout chargé de faciliter le travail de l’envoyé spécial qui va tirer la couverture à lui

Qui croire ? Après, il ne faudra pas s’étonner que le public, de plus en plus, délaisse les médias et préfère écouter la version moderne des propos de bistrots, que sont les « réseaux sociaux » qui bénéficient des technologies modernes et donnent l’impression à ceux qui les suivent qu’ils ne peuvent dire que la vérité.

La directrice de France Inter, Adèle Van Reeth, n’hésite pas : « L’esprit de France Inter ? C’était lui ! Claude Villers vient de nous quitter. Nous continuerons à chérir son héritage ». Elle n’a probablement, vu son âge, jamais écouté une seule des émissions de Claude Villers et peut-être jamais écouté France-Inter avant d’en être la directrice. Aujourd’hui, on ose tout. D’ailleurs, il suffit d’écouter les productions actuelles pour constater qu’on est loin de l’esprit de Claude Villers, notamment parce qu’il n’y a plus de création radiophonique mais un modèle unique autour de « mon invité ».

 

photo extraite de https://gonzomusic.fr/adieu-claude-villers.html

Il faut lire l’article aussi qui est formidable (et je ne connais pas l’auteur) !

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17 décembre 2023

Claude Villers en flagrant délire de fuite

Encore un personnage qui a accompagné la vie de l’auditeur impénitent que je suis et que la mort incite, sous prétexte de lui rendre hommage, à évoquer une vie brillante. Comme beaucoup, j’ai découvert Claude Villers lorsqu’il a été appelé pour en finir avec les soirées thématiques sur France-Inter et fabriquer une émission si possible originale. Il ne s’agissait pas de faire comme les « périphériques », c’est à dire les 2 ou 3 autres radios généralistes en Grandes Ondes. C’est ainsi qu’on a entendu « Pas de panique », « une émission comme vous n’en avez jamais entendu et n’en entendrez jamais », ainsi qu’il le clamait dans les annonces qui ont précédé la mise en place des nouveaux programmes en janvier de cette année-là. Je ne vérifie pas la date. Ça n’a pas vraiment d’importance. C’était au début des 1970s, donc, encore sous l’ORTF. C’est ainsi qu’on a eu ce programme qui, outre nombre de chansons, était truffé de rubriques sur le cinéma, les voyages et même, l’opérette et le jazz. Ça, c’était l’affaire de Patrice Blanc-Francard, l’autre élément auquel il faut ajouter Olivier Nanteau qu’on n’entendait jamais. Nombre de grands noms de France-Inter ont accompagné cette aventure, notamment M. Jean-Claude Bourret auquel il avait demandé une série de reportages sur les ovnis. Depuis, M. Bourret y est indéfectiblement associé et moqué par tous ceux qui n’ont jamais écouté « Pas de panique ». Auparavant, Claude Villers animait des émissions où il s’écoutait parler et il avait été également correspondant aux États-Unis. C’est également lui qui a présenté le « Pop-Club » pendant que José Artur, accessoirement son voisin de palier, était en disgrâce. Bien sûr, tant d’années, tant de décennies après, on a vite fait des raccourcis. Si l’on oublie « Marche ou rêve », plus orientée sur les voyages, le rêve, on souligne surtout « Le tribunal des flagrants délires » où il est de bon ton de rappeler les interventions de P. Desproges dont il s’est pourtant séparé comme tous ceux qui ont travaillé avec lui. Desproges étant devenu la référence morale et culturelle, il est impossible de rappeler quelle était sa véritable personnalité. Dans « Le tribunal », puis dans « Le vrai-faux journal », outre les intervenants habituels et connus, des gens comme Mme Patricia Martin ou M. Laurent Ruquier ont débuté comme simple collaborateurs, chargés de préparer les émissions.

 

À la faveur de l’arrivée de la gauche au pouvoir, Claude Villers s’est vu confier des responsabilité à la direction de Radio Monte-Carlo, alors contrôlée par la Sofirad. Il n’y a pas réussi, comme il n’a pas réussi à la direction de Pacific FM, « la radio avec vue sur la mer ». Il était plus à l’aise derrière un micro, si possible à raconter des histoires. Bien que se vantant de plusieurs dizaines d’années de carte de journaliste, il ne faut pas oublier qu’il a aussi été catcheur dans la baraque foraine de Jackson, par ailleurs son beau-frère, baraque plus que réputée dans les fêtes de la région parisienne et qui débutait son boniment en clamant : « un spectacle comme vous n’en avez jamais vu et n’en verrez nulle part ailleurs ».

 

Claude Villers avait les défauts qui ont été rappelés mais c’était un grand professionnel, un animateur de radio hors pair, bourré d’idées, passionné et très actif dans la création radiophonique.

 

 

claude villers + PBF (archivesdufolk59-62

 Photo : https://archivesdufolk59-62.blogspot.com/2012/09/claude-villers-cassel.html

 

13 décembre 2023

Une nouvelle plume pour Le Masque

Les résultats sont tombés le mois dernier, Inter caracole en tête de l’audience des chaînes de radio. Par conséquent, il n’est pas utile de s’étonner de la programmation, d’émissions coupées en deux ou avec deux équipes, ni de celles qu’on rallonge ou qu’on diffuse deux ou trois fois en 10 heures. C’est le cas du « Masque & la Plume » dont nous allons parler et qui rentre bien dans cette tendance puisque le producteur et animateur s’en va en pleine saison au lieu de céder sa place en juin ou de ne pas l’avoir reprise en septembre. Comprenne qui pourra.

le masque et la plume

D’abord, rappelons que cette émission a toujours constitué un État dans l’État. Du temps de François-Régis Bastide, il répondait par l’ignorance au courrier des auditeurs qui évoquaient l’émission diffusée en lieu et place, pendant les vacances : « Les étoiles du cinéma » d’André Asséo. Plus récemment, au début du siècle, l’émission possédait sa propre page sur l’Internet et c’est en rechignant que la production s’est pliée aux injonctions de la direction de la chaîne de rejoindre le site d’Inter. Il a été rappelé lors des 2 petites heures consacrées un vendredi soir, aux 60 ans de la station, https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/france-inter-fete-ses-60-ans/france-inter-fete-ses-60-ans-du-vendredi-08-decembre-2023-5216718

que l’émission était enregistrée à l’extérieur des studios et que l’équipe de l’époque a traîné les pieds pour rejoindre la toute nouvelle Maison de la Radio, comme si c’était infamant de se retrouver avec le reste de Paris-Inter puis France-Inter. Bien entendu, la raison invoquée est le choix du public. Depuis, sous couvert de la sacro-sainte liberté dont se prévalent les Français, elle conserve son indépendance et n’hésite pas à descendre un film labellisé France-Inter. Enfin, pour faire face à la restriction budgétaire imposée par les Gouvernements depuis plusieurs années, visant à affaiblir les médias de l’État – probablement en vue de leur privatisation – cette émission est désormais diffusée le dimanche matin avant d’être seulement reprise à son heure quasi séculaire. Parait-il que l’audience du matin est plus forte et que l’ensemble cumulé bat des records. Par conséquent, comme auraient dit Bory, Charensol et les autres à propos du « Livre de la jungle », revu par les studio Disney, on peut se permettre d’être sincère, vu que ça ne changera rien.

Pourquoi en parler alors ? Simplement parce qu’à la fin de l’année civile, l’animateur actuel, M. Jérôme Garcin, va céder le micro après une longévité sans comparaison. C’est Mme Rébecca Manzoni qui va succéder. On peut supposer qu’un choix féminin était souhaité en haut-lieu malgré le peu de femmes qui choisissent la culture comme spécialité journalistique ou comme critique. Du coup, comme en sports, celles qui sont en place ou les rares qui postulent sont assurées de promotion rapide. Heureusement, on n’est plus à l’époque où un journaliste à forte personnalité obtenait qu’Hélène Vida, toute première femme à présenter le journal de 20 h à la télévision, soit écartée au simple motif qu’elle était une femme. C’est la raison pour laquelle Hélène Vida n’a pas duré et a été effacée de l’histoire de la télévision qui retient un autre nom comme première présentatrice. Des noms effacés, il y en a quelques uns sur la page du « Masque & la Plume » ; comme par exemple Bernard Deutsch qui, en plus de collaborer au fameux « Magazine de Pierre Bouteiller », co-animait l’émission après le départ de Michel Polac. Les divers pianistes ont aussi été effacés. Il n’a même pas été évoqué lorsqu’il est mort. À l’époque, seule Mme Sophie Loubière, qui l’avait connu à ses débuts, s’était fendue d’un hommage en début d’émission.

Jérôme Garcin anime donc « le Masque & la Plume » depuis plus de 30 ans. Il succède lui-même à Pierre Bouteiller qui avait le don de ficher la pagaille partout où il passait, en dehors de son « Magazine » d’excellente tenue, d’ailleurs. Ce n’était donc pas facile d’arriver et de trouver des critiques qui avaient l’habitude de la grossièreté, des éclats de voix, de l’intolérance. Il a donc fallu remonter la pente et parvenir à une tribune d’échanges. Au début du siècle, M. Garcin a tout de même prétendu renouer avec les joutes verbales entre 2 critiques habitués en favorisant une sorte de pugilat oral. Cela avait provoqué de nombreuses réactions d’auditeurs qui se plaignaient de payer une redevance pour entendre des insultes sans que ça fasse avancer l’éclairage sur les œuvres incriminées. Là encore, il a fallu du temps pour revenir à la normale et l’échange d’idées. La tâche est d’autant plus difficile depuis cette époque, dans la mesure où, à part les plus anciens (mais qui ne reflètent plus les goûts du public actuel), les critiques sont à peu près incultes. C’est flagrant en « cinéma » où ils connaissent bien les techniques, en parlent souvent pour masquer leur manque de connaissances générales. Certes, ils citent des films considérés comme classiques mais sont incapables de citer des écrivains, des tableaux, des pièces de théâtres ainsi que le faisaient naturellement ceux des 1960s puis 1970s. Surtout, ils reprennent les dossiers de presse qu’ils reçoivent pour chacune des œuvres dont ils parlent et ils ne parlent que des œuvres qui sont accompagnées d’un dossier de presse. À partir de là, ils citent un technicien qui a travaillé avec un cinéaste prestigieux, ils se répandent sur les intentions de l’auteur, et n’ont pour ainsi dire pas besoin de voir ou lire ce dont ils parlent puisque tout est dit dans le dossier de presse.

Donc, il a fallu reprendre après l’intermède de P. Bouteiller, pourtant incontestablement cultivé lui aussi. En « livres » (pas en littérature), le constat est identique et l’on voit que l’écriture classique, le style, sont rejetés impitoyablement, ringardisés. En fait, l’écriture importe peu : c’est le sujet qui compte. S’il est graveleux, introspectif, impudique, glauque, il aura les faveurs de l’aréopage présent ce soir-là. Les extraits lus montrent tous une pauvreté littéraire, voire une langue bourrée de fautes ; et ce ne sont que des extraits. M. Garcin, dans tout ça, jubile, distribue la parole, la coupe plus souvent qu’à son tour et se complait depuis quelques années dans ce qu’on pourrait appeler des private-jokes, si l’intention était humoristique. Il n’en est rien. Désormais, il s’en prend systématiquement à un ou deux commentateurs présents sur le plateau, l’intimant, dès qu’il commence, de ne pas révéler la fin. Par conséquent, on a même du mal à savoir comment ça commence. Ces interruptions durent plusieurs dizaines de secondes à chaque fois. Pour d’autres, il insinue tout le temps que tel critique n’a pas lu le livre dont il va parler. À ce stade, il n’a pas commencé son commentaire que déjà, il est interrompu. L’autre, prévoyant, lit des pages dont il indique le numéro mais rien n’y fait : c’est le critique qui ne lit pas les livres. Pourtant, c’est un des rares à citer les grands écrivains, à comparer. Les autres ne connaissent que les auteurs à la mode. Et puis, chaque fois que l’un se lance dans une argumentation, il est interrompu au prétexte qu’il faut aller vite, qu’il y a d’autres œuvres au programme, qu’un autre n’a pas encore parlé. Bien sûr, il se défend, promet qu’il termine mais peine perdue et ce sont encore des dizaines de secondes passées en vains bavardages plutôt que de traiter films, livres dont il est question. Voilà le bilan de M. Garcin et je ne le regretterai pas à ce poste.

L’émission s’intitule « Le Masque & la Plume » et il n’a pas été question de théâtre. En effet, il n’y a plus qu’une émission tous les 2 mois et cela reflète évidemment le goût du public. Il se vend des millions de bouquins, même mal écrits, même très mal écrits, même si les plus jeunes préfèrent lire sur des tablettes. Le cinéma cartonne. On ouvre ou rouvre des salles un peu partout. On en ferme aussi puisque le plus grand cinéma de Paris, sur les prestigieux Champs-Élysées, vient de liquider, sans doute parce que le loyer a augmenté et parce que les plateformes en ligne permettent de visionner tranquillement des films sans le bruit et l’odeur du pop-corn, sans les sonneries de téléphone, et en pouvant revenir un peu en arrière si l’on n’a pas compris une réplique. Le cinéma se porte bien, grâce surtout aux subventions dont il bénéficie de la part de l’État, pourtant détesté unanimement. Le théâtre aussi est subventionné mais c’est plus compliqué. Gageons que les spécialistes vont incriminer le confinement et la guerre en Ukraine. On peut plus raisonnablement penser que le public a fini par en avoir marre de payer cher pour voir une œuvre mais d’assister aux délires des metteurs en scène qui s’assoient sur les textes des auteurs grands et petits. Forcément, une tribune comme « le Masque & la Plume » en pâtit. Néanmoins, ça demeure la seule où des voix éclairées citent les dramaturges, parlent des décors, de la mise en scène (surtout), comparent avec des spectacles donnés au Festival d’Avignon ou autrefois, parfois il y a longtemps. C’est qu’ils sont tous âgés. Les jeunes associent le théâtres comme la littérature à l’exercice scolaire qui ne leur a pas laissé de bons souvenirs mais plutôt des contraintes. Ça ne les empêche pas d’être lucides sur les mises en scènes insensées.

Souhaitons bonne chance à Mme Manzoni dans ce nouveau rôle et espérons qu’elle ne va pas tomber dans ses travers habituels consistant à décrire au micro des incidents sans intérêt, et, depuis la rentrée, à appuyer lourdement sur le tutoiement des confrères sur le plateau. Ça donne une impression d’entre-soi (qui n’est pas qu’une impression) qui met mal à l’aise, quand le vous passe inaperçu. Enfin, vœux pieu, souhaitons que la dernière de M. Jérôme Garcin soit une fête et joyeuse. Les deux heures de commémoration des 60 ans de la station étaient tristes à mourir mais ça reflète bien la mentalité ambiante dans la Maison ronde où l’on confond systématiquement sérieux et ennui. La longévité du « Masque » est tout à fait exceptionnelle : bientôt 70 ans… Celle de M. Garcin au micro l’est également. On aimerait que tous les critiques soient présents, racontent des anecdotes liées à l’émission, révèlent des secrets amusants. Gageons qu’on aura l’émission habituelle et que M. Garcin signalera en tout fin, pendant Mendelssohn, qu’il tire sa révérence sous les applaudissements. C’est cela France-Inter et il faut croire que ça plaît.

 

 

13 septembre 2023

Victor Jara 1973

 

VICTOR JARA

 

 

J’achèterai mille guitares

Pour pouvoir jouer nuit et jour

Ton souffle ce sera ma voix

Et mes mains ce seront tes mains

          Compañero

 

Mille guitares six mille cordes

Il faudra bien que l’on m’écoute

Je redirai mille fois mot

Les morts du stade à Santiago

          Compañero

 

Quand tu te lèves en battant la mesure

Tes mains ne sont déjà plus mains

Mais ton combat ne crains pas la blessure

Quand tu entonnes l’hymne Chilien

          Compañero

 

Et chaque jour j’écrirai ma chanson

Et chaque jour ta guitare renaîtra

Et de ma voix je chanterai ton nom

Il faudra bien que l’on m’écoute

          compañero

 

Quand tu te lèves en battant la mesure

Le sang s’écoule comme pour témoigner

Cinq mille voix résonnent sur les murs

Que tes bourreaux ne peuvent arrêter

          Compañero

 

J’achèterai mille guitares

Pour pouvoir jouer nuit et jour

Ton souffle ce sera ma voix

Et mes mains ce seront tes mains

          Compañero

 

 

Paroles et musique Gérard-André Gaillard (1973)

Enregistrement sur 45t en 1973 et en 2000 sur le CD "Le temps"

 

Communiqué de Gérard-André

 

 

Madame, Monsieur,

 

Malgré la canicule je garde en mémoire ce triste mois de septembre 1973

 

Il y a 50 ans, aidé par l’armée navale étatsunienne, Augusto Pinochet faisait un coup d’état au Chili et mettait fin à un gouvernement très démocratiquement élu. 
Sous les ordres de Pinochet, le stade de foot de Santiago du Chili était transformé, comme presque dans d’autres temps, en un camp de concentration et de torture ( dans les vestiaires et sur la pelouse ) de ce célèbre stade. 
S’ensuivit des milliers de morts. 
    
En 1973, jeune chanteur, je fus bouleversé lorsque mon grand aîné VICTOR JARA, chanteur, guitariste, auteur- compositeur, aussi connu dans toute l’Amérique Latine qu’un Jean Ferrat, ou qu’un Jacques Brel chez nous, fut reconnu parmi les prisonniers et lâchement assassiné sur le stade de foot ; les mains de ce grand guitariste furent mutilées à coup de crosse de fusil (l’information de l’époque parlait aussi de doigts coupés...) Peu importe...

Victor Jara, poète à la voix d’or, fut assassiné.

Comme des millions de Français et de Citoyens du monde, j’ai participé en tant qu’homme et en tant que chanteur, aux manifestations et protestations et à la solidarité avec ce peuple que je ne connaissais guère.

Et le 13 septembre 1973 j’ai écrit et composé, en 24 heures, la chanson ci-dessous : Victor Jara, que je chante toujours, ici ou là, et chaque fois qu’on me le demande et dans nombre de mes spectacles.

 

Si une radio ou un média audio-visuel le souhaite, je peux, même à l’improviste, vous la chanter, devant un micro par téléphone ou devant une « bête » caméra ou une webcam devant l’ordinateur.

 

Quoi qu'il en soit, j’espère pouvoir, jusqu’à mon dernier souffle, chanter Victor Jara en hommage à mon « frère » de poésie.

 

30 août 2023

La télé sous Giscard

Donc, j’ai regardé https://www.youtube.com/watch?v=-op2loI2UCM

La TÉLÉ sous GISCARD - la FOLIE des ANNÉES 70 |Documentaire Histoire de la TÉLÉVISION

 

Un documentaire des plus intéressants car à travers les extraits d’émissions de variétés et autres, c’est toute la société française qui apparaît, qui est décrite avec ses goûts et ses inclinaisons.

 

Il y a qq erreurs mais pas bcp, pas assez pour remettre en cause le travail. Commençons par les critiques. D’abord, il y a l’usage d’archives anachroniques, c’est à dire où l’on voit le personnage dont on parle mais à une autre époque ou dans un autre contexte. Ensuite, comme il est bcp question de la réforme de 1974 qui aboutit à l’éclatement de l’Ortf, on rappelle les débuts des 3 nouvelles sociétés de télévision mais en oubliant que TF1 n’était pas en couleur et l’a été tardivement. Pourtant, à l’époque, bcp de foyers ne recevaient que la 1ère chaîne. C’est pour ça qu’on ne peut pas comprendre pourquoi l’on voit Y. Mourousi apporter un panneau de couleurs destiné à décorer son studio. En revanche, le générique de Catherine Chaillet en couleurs ne pouvait être celui de janvier 1975, puisque la chaîne était en noir et blanc. Elle en a créé un plus tard et en couleurs : c’est celui qu’on voit dans les extraits.

 

L’erreur majeure est l’usage de l’expression « état de grâce ». On l’a inventée à l’occasion de l’élection de Mitterrand en mai 1981 car il régnait alors une atmosphère particulière faite de bonne humeur, de joie de vivre, de détente, qui a duré environ un an. C’est unique dans l’Histoire du pays. On a réutilisé cette expression en 1995, pour l’élection de Chirac, après 14 ans de mitterrandie et une fin de règne déplorable. Le but était de façonner un pendant pour faire croire que la population pouvait aussi se réjouir quand la droite venait au pouvoir et pas seulement quand triomphe le Front Populaire ou l’union de la gauche. Par conséquent, je défie quiconque de trouver l’expression « état de grâce » en 1974. Cependant, il est juste de souligner que, comme à chaque élection présidentielle, naturellement, la plus grande partie de la population, celle qui a voté pour le vainqueur, se réjouit et le fait savoir. Seul le taux d’abstention élevé des dernières occurrences diminue cette réaction somme toute normale et démocratique. En plus, le style moderne du PR Giscard, sa décontraction, les premières mesures prises, le choix d’un PM encore plus jeune que lui, réjouissent au-delà de l’électorat qui a conduit Giscard à l’Élysée. D’un autre côté, celui, conservateur, qui a voté pour lui par défaut, voit ces changements d’un mauvais œil et les prend même comme une attaque dirigée contre lui. L’opposition, elle, s’obstine et reconnaît du bout des lèvres les progrès impulsés par le nouveau PR.

 

JMD CAntenne 2 est un cas à part. Voulue par le PR Giscard, cette chaîne devait prouver le changement (dans la continuité : slogan de la campagne de VGE) avec un style nouveau, moderne, ouverts aux opinions et à la création. On apprend que, dès le début, si la nomination de Jacques Sallebert à l’information est acceptée, celle de Philippe Gildas, qui avait pourtant déjà exercé des fonctions directoriales à l’Ortf est refusée. Chirac à Matignon entend freiner tant qu’il peut la volonté d’émancipation et de progrès lancée par l’Élysée. Sur les autres chaînes, l’installation des cadres ne pose pas de problèmes car tous proches de la majorité ; terme employé à l’époque pour désigner la droite et qui ne sera jamais repris à partir de 1981. ll est dit que c’est lui qui a dissuadé A2 de proposer des émissions à Sartre. C’est sans doute vrai mais Sartre n’était pas non plus très chaud. Avec Brigitte Bardot, c’était différent. Elle faisait partie des célébrités qui avaient appelé à voter pour Giscard. On pensait donc que les risques étaient limités à son incompétence télévisuelle. On voit dans l’extrait que cette méconnaissance des codes l’amène à mettre les pieds dans le plat et à apostropher fermement le Ministre invité et à insister jusqu’à obtenir une réponse (presque) satisfaisante. À l’époque, c’était du jamais vu. Même S. Veil, tout auréolée de l’adoption de sa loi sur l’IVG doit composer avec. Peut-être que des problèmes relationnels existaient entre BB, non professionnelle, et son équipe mais l’on peut penser aussi que le pouvoir s’est réjoui de la non reconduction de son émission.

 

Le JT d’A2 a connu sans doute le plus de péripétie. On sait que sur TF1, Y. Mourousi est passé en force car son supérieur, le reporter Christian Bernadac n’avait pas aimé la première édition et comptait même ne pas y donner suite. Finalement, Mourousi a imposé le style qu’il avait expérimenté sur France Inter pendant près de 8 ans et a duré 13 au « 13 heures » de la première chaîne. Encore une fois, à l’époque, au mitan des 1970s, tous les foyers ne recevaient pas les 3 chaînes. La plupart n’en captaient que 2 et encore beaucoup n’en disposaient que d’une, la première. Il a été rappelé que la toute nouvelle TF1 avait misé sur la personnalisation du journal télévisé. Au « 20 h », l’ancien directeur de l’information de France-Inter, Roger Gicquel, officie. Les réalisateurs de ce documentaire ont bien évidemment passé son ouverture de journal quand il dit : « La France a peur ». Seulement, ils ont rappelé le contexte : le meurtre d’un petit garçon. Ensuite, contrairement à l’habitude quand on diffuse cet extrait, ils ont passé son introduction en entier où il conclut en mettant en garde contre les risques de vengeance. Autrement dit, Gicquel prônait tout le contraire de ce qu’on lui a reproché pendant des années ; au point d’en faire un sécuritaire. Personnalisation, donc et par conséquent, l’audience du JT de 20 heures, « IT1 » caracolait en tête. On a donc considéré que la formule du « Journal d’Antenne 2 » était à revoir et notamment sa présentation. Exit « les minets », terme employé par la presse pour désigner les présentateurs en alternance. Contrairement à ce qui est dit dans le documentaire, Jean-Michel Desjeunes n’était pas un jeune loup venu d’Europe 1. C’était déjà lui qui officiait au JT de la 2e chaîne-couleurs qui s’appelait alors « INF2 ». D’ailleurs, les images de JM Desjeunes montrent derrière lui l’habillage de l’ancien JT de la 2e chaîne de l’Ortf. Pierre Lescures, lui, présentait les titres du journal aux environs de 18 h 45. Les deux partiront et rejoindront ensemble Europe1 où ils recruteront une petite nouvelle dans leur émission : Anne Sinclair. C’est dire si Jean-Michel Desjeunes était compétent et ce qu’il aurait apporté en restant dans la rédaction d’A2. Les « minets » ont donc été remplacés par des présentateurs d’âge mur, censés rassurer les téléspectateurs : Guy Thomas (à 20h), Roland Melh et un troisième que j’oublie. Malgré tout, la formule de la rentrée de 1975 ne décolle pas. Le documentaire passe directement à la nomination de Jean-Pierre Elkabach en janvier 1977, présentée comme l’ultime solution pour rattraper TF1. En réalité, il s’agissait de nommer une personne sûre à la tête de la turbulente rédaction d’Antenne2 dans la perspective des élections législatives de 1978 qui s’annonçaient incertaines pour la majorité. Pourtant, il aurait été intéressant aussi de rappeler ce qui apparaît forcément comme une parenthèse, avec le recul du temps. De janvier 1976 à janvier 1977, c’est un trio ultra professionnel qui prend les rênes de la rédaction. Le directeur de l’information est Charles Baudinat, le rédacteur en chef est Georges Leroy (venu lui, d’Europe1) et son adjoint, faisant pourtant partie aussi des « minets », est Jean-Marie Cavada. À eux trois, ils réinventent la formule du JT. D’abord, ils changent l’identité visuelle. Adieu la déclinaison de Folon, place à un logo semi-hexagonal. Ensuite, pour la première fois, une femme présente le JT de 20 h, Hélène Vida, venue d’RMC. D’autres jeunes, comme Gérard Holtz, Patrick Poivre d’Arvor (qui n’est pas rémois mais breton), Gérard Sebag, Hervé Claude, se chargent des remplacements et des autres éditions. L’audience remonte mais à l’époque, les rédactions sont très masculines et, à part les jeunes qui n’y voient pas d’inconvénient, les cadres comme Jérôme Bellay, obtiennent qu’Hélène Vida ne soit plus à l’antenne à la rentrée. https://www.youtube.com/watch?v=dZfPzdbsofI

JT A2 H 4Ce sera plutôt PPDA qui occupera le poste, en alternance avec les autres déjà cités. Les « hommes mûrs » ne partent pas mais occupent une fonction d’éditorialistes, tout à fait nouvelle. Guy Thomas alterne avec Paul Lefèvre, selon l’actualité. Le 2e étant jusqu’alors chef du service judiciaire. La formule ne durera pas, avec ou sans femme à la présentation, car il fallait alors reprendre en main la rédaction, ce sera chose faite avec Elkabach. Il choisit, en effet, d’essuyer les plâtres de la nouvelle formule du JT mais, au contraire de ses prédécesseurs qui dirigeaient le service, lui entend aussi présenter les émissions. C’est notamment cette omniprésence à l’antenne (2) qui lui sera reprochée et conduira à son éviction à l’été 1981, après avoir fait subir son autoritarisme à l’ensemble de la rédaction. Bien sûr, on ne peut pas tout rappeler mais il aurait été bon de mentionner qu’il a aussi organisé le seul débat national à ce jour sur la question de l’énergie nucléaire. En coopération avec la rédaction de France-Inter d’où il venait et où il avait déjà sans doute commencé à préparer quelque chose, il propose des reportages sur presque tous les sujets en lien avec le nucléaire. Avec un institut de sondage, il recrute un panel de Français représentatifs, présents sur le plateau avec les représentants des 4 grandes formations politiques de l’époque : le PCF, le PS, l’UDF et le RPR. À l’époque, seul Paul Quilès pour le PS était contre. Les Français « représentatifs » étaient tous contre ou inquiets. De même, il n’a pas été rappelé que la première expérience de TV du matin, a eu lieu sous l’ère Baudinat-Leroy-Cavada, pendant les vacances de février de cette année-là. Était aux manettes, une équipe de jeunes, emmenée par PPDA, qu’on ne surnommait pas comme ça alors car il était quasiment inconnu quoi que devant sa carte de journaliste à un reportage aux Philippines qui avait été primé à un concours, plusieurs années auparavant.

 

Le documentaire fait la part belle aux variétés qui occupaient une large place dans les programmes de TV de l’époque. Ça plaisait puisque souvent, celles de Guy Lux battaient le monopole du film du dimanche soir. Il y avait donc un public pour ça et si elles nous paraissent désuètes ou ringardes aujourd’hui, nombreux étions-nous, jeunes à l’époque, à les apprécier et à nous reconnaître. De même Maurice Favières, qui fait partie des tout meilleurs animateurs de radio de l’époque, a talonné très souvent les JT des deux autres chaînes avec ses « Jeux de 20h ». Ça annonçait déjà la désaffection du public pour l’information et les problèmes du monde et donc le recul de la conscientisation de la jeunesse.

Danielle Gilbert est souvent citée. On dit qu’elle est la première à inviter des politiques dans ses émissions. Elle n’invitait que des membres de la majorité et se réjouissait quand un ministre, par ailleurs élu local (cumul des mandats à l’époque) s’introduisait dans son émission en direct d’une ville de province. En revanche, quand le personnel en grève du Parisien Libéré apparaissaient, profitant d’un direct, l’antenne était aussitôt coupée. C’était ça aussi la « télé de Giscard ». Oh, si ça n’existait pas avant lui, c’était parce qu’il n’y avait pas d’émission en direct d’un lieu public. Ça aussi, c’est une invention d’Yves Mourousi. C’était bien de rappeler que Supertramp a fait sa première télé en France chez elle mais Julio Iglesias aussi. J’y étais. D. Gilbert avait cessé d’inviter des hommes politiques dans son émission jusqu’à décembre 1980, soient 6 mois avant la présidentielle où elle reçoit A. Peyrefitte, alors Ministre de la Justice, qui venait de faire voter la loi « Sécurité et Liberté » qui accordait plus de place à la première qu’à la deuxième. On a oublié le contexte de l’élection de Mitterrand et pourquoi il y a eu « l’état de grâce » après mai 1981.

« Les dossiers de l’écran » sont inévitables. On n’a pas cité Guy Darbois, qui tâchait de synthétiser les appels des téléspectateurs SVP 11 11. Cette émission existait déjà du temps de l’Ortf.

C’est bien d’avoir rappelé que « Le petit rapporteur » de Jacques Martin était la première intervention d’une équipe de chroniqueurs. Il aurait été bon de citer ceux du début comme Robert Lassus, par ailleurs rédacteur en chef à RTL et de rappeler que Stéphane Collaro a intégré l’équipe, dès le départ, faute d’avoir trouvé une place dans les rédactions sportives des sociétés de radio et de télévision qui ont succédé à l’Ortf. Il était pourtant un élément majeur de celle de la première chaîne de l’Ortf. Il se présentait alors comme « le renvoyé spécial ». Bien sûr, on ne parle que de Desproges qui, contrairement à ce qui a été indiqué, a bien intégré « La lorgnette » mais n’y est pas resté. Il faut dire que comme beaucoup d’humoristes professionnels, il était hors antenne l’exact contraire de ce qu’il était à l’écran. Les relations avec lui étaient très difficiles et J. Martin comme Claude Villers dans le « Tribunal des flagrants délires » ont fini par l’exclure. Il n’a plus fait que des émissions tout seul et encore n’ont-elles pas duré. Les fous rires de Denise Fabre étaient aussi célèbres. Ils ne plaisaient pas à tout le monde. C’est qu’on ne rigolait pas à l’antenne à l’époque. C’était bien de le rappeler en passant.

 

Dans toutes les émissions utilisant des archives (comme « Affaires sensibles » ou le site de l’INA), on se répand sur des personnalités que tout le monde connaît et qui font l’objet de l’émission mais on ne cite pour ainsi dire jamais les journalistes ou les animateurs des émissions où ils interviennent. Dans ce documentaire, à de très rares exceptions, tous les professionnels sont cités et c’est bien, notamment pour ceux comme Claude Ruben, totalement oubliés.

 

 

 

24 août 2023

Éducation, domaine réservé du Président ?

Éducation, domaine réservé du Président ?

 

Il semblerait que le Président de la République veuille faire de l’Éducation National un domaine réservé, comme le sont les relations extérieures. Faut-il s’en réjouir ? A priori, oui parce que ça signifie que désormais, les meilleurs conseillers vont apporter leurs lumières sur ces dossiers. Ce sont maintenant des dizaines d’années pendant lesquelles le niveau n’a cessé de baisser dans presque toutes les matières malgré des progrès. Le classement PISA qui fait autorité (on en pense ce qu’on veut) est contesté en France depuis qu’il met en lumière la régression du niveau d’acquisition des connaissances, autrement dit l’échec des expériences pédagogiques menées depuis des dizaines d’années pour faire plaisir à quelques personnes, dans des bureaux, loin des élèves.

effel - école 1Dans le passé, le Président Mitterrand, qui n’avait nul besoin de conseillers en ce domaine, avait imposé ses idées et son autorité était telle que, malgré la personnalité du ministre Savary, ce sont les marottes mitterrandiennes qui s’imposeront : l’Histoire notamment. C’est ainsi que cette matière fait l’objet d’épreuves écrites et est devenue une matière principale. Quand on voit le résultat, on ne peut pas dire que la somme de travail que nécessite l’Histoire ait réconcilié les Français avec leur histoire mais personne n’est revenu sur cette priorité. Plus récemment, le Président Sarkozy avait eu l’idée, selon ses termes, d’offrir à tous les élèves, une heure de cours particulier par jour, gratuitement. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la formule n’a pas beaucoup aidé puisque le niveau global a continué de baisser. Le Président Macron, appartient à cette race qui considère qu’avant eux, à part eux, rien n’a jamais existé, rien n’existe et qu’on peut s’épargner l’analyse des expériences tentées. Donc, il propose de voler au secours de l’échec scolaire, dans une démarche d’inclusion tout à fait honorable. Ainsi, il propose que la rentrée des classes soit avancée au 20 août pour les élèves en difficulté. Fort bien ! On ne peut que s’en réjouir : enfin, une mesure forte. Sauf que personne ne se demande, personne n’a semblé indiquer au Président, pourquoi ces élèves sont en difficulté. La réponse est pourtant connue de tous, parents, enseignants, élèves eux-mêmes. Ils sont en difficulté parce qu’ils n’aiment pas l’école. Et ils n’aiment pas l’école parce qu’ils n’aiment pas l’atmosphère, ils n’aiment pas les locaux, parce qu’ils n’aiment pas ce qui s’y passe, parce qu’ils n’aiment pas un prof. Les enfants, les ados fonctionnent essentiellement à l’affect. La maladresse d’un enseignant suffit parfois pour dégoûter durablement un enfant de l’école et de tout ce qui y ressemble. Il n’est pas utile de rappeler les conséquences.

Bien entendu, à quelques rares exceptions, ce n’est pas la personnalité, ni la compétence des profs qui est en cause mais le ressenti. Quoi qu’il en soit, un élève en difficulté est un élève qui n’aime pas l’école et ce n’est pas en lui rajoutant des heures en plus, des jours en plus, pendant que les autres disposeront de leur temps, qui va lui faire aimer cette institution. D’autant que, depuis environ 50 ans, le diplôme n’assure plus de trouver un travail et commencer une carrière, quelle qu’elle soit. Les élèves le savent bien. Ils voient autour d’eux des plus grands qui se font du pognon, roulent en berlines allemandes quand d’autres, bardés de diplômes, font le tour des agences d’intérim, espérant être enfin repérés et embauchés quelque part. On veut donc imposer à ces élèves en difficulté de passer encore plus de temps dans un endroit qu’ils détestent. Depuis des dizaines d’années, les mesures qui leur sont destinées, se sont ajoutées, ont remplacé les précédentes. Pour simplifier, elles consistent toutes à profiter d’un trou dans l’emploi du temps, pour les convoquer. Seulement eux, ne voient qu’une chose : il doivent revenir dans une salle de classe, avec un adulte : prof en complément d’emploi du temps, intervenant recruté à cet effet. Ils quittent leurs camarades, se retrouvent entre « élèves en difficultés », entre mal aimés pendant que les autres font autre chose, à leur convenance. À partir de là, plus rien n’est possible. Tous les professeurs qui ont dû rattraper des cours, qui ont animé les « aides au travail » ou quelle que soit la terminologie employée, savent que ces heures supplémentaires, dans l’intérêt des élèves ne mènent à rien. Les élèves y vont à reculons et le font comprendre au professeur, tout au long de la séance. Les meilleurs élèves ne participent pas ; les autres non plus, forcément. On peut évaluer à un quart d’heure le temps utile passé au cours de ces séances destinées principalement aux élèves en difficulté.

Au lendemain de l’annonce, des chefs d’établissements ont indiqué que cette mesure serait vécue comme une sanction par les élèves concernés. Où l’on voit bien une illustration supplémentaire de ce que j’appelle « les mondes parallèles ». Il y aurait un monde idéal où les élèves se précipiteraient à l’école, plein de curiosité, avides de connaissances en tout genre. Ce monde sert de base de travail aux cadres de la rue de Grenelle qui, après avoir été conseillers pédagogiques puis inspecteurs, afin de les sortir des classes qu’ils ne tenaient pas, exposent à ceux qui sont sur le terrain comment ils doivent faire. C’est ce monde aussi qui est repris par les médias, analysé, commenté. Et puis, il y a le monde réel. Il y a les élèves qui se lèvent tôt pour prendre un car aux vitres embuées, qui se précipitent sur l’affichage des absences de profs, qui montent déçus, machinalement, dans des classes surchargées. Il y a ces professeurs, qui traversent parfois tout le Département en voiture, qu’il pleuve, qu’il neige ou dans le brouillard, qui prennent des risques pour ne pas arriver en retard ces jours-là, et qui arrivent déjà énervés, fatigués, devant leurs élèves. Il y a ces profs qui ne comptent pas leurs heures, qui pensent en permanence à améliorer leur pédagogie et n’ont pour toute satisfaction que de voir progresser une petite poignée d’élèves sur l’ensemble de l’année. Et ne parlons pas des conflits qui minent le travail de l’équipe pédagogique et engendrent une mauvaise ambiance dans un établissement. Ça, c’est la réalité que personne ne peut nier. Si à présent, on dit à des élèves que leurs notes se situent en dessous d’un niveau défini – ce qui n’est déjà pas agréable – et que, d’autorité, ils commenceront l’année scolaire avant les autres qui seront toujours en vacances, ça sera vécu plus mal qu’une sanction disciplinaire. Ces élèves ressentent déjà leur collège (maillon faible du système) comme un lieu d’enfermement et de privation de liberté. On va les obliger à y aller un peu plus longtemps que les autres. C’est tout ce qu’ils voient. Allez leur dire : c’est pour ton bien ! Il y a longtemps que ça ne marche plus ; si tant est que ça ait jamais marché.

Bien sûr, le lecteur est en droit de demander ce qu’il faut faire. D’une part, dresser le constat, encore, est indispensable et préliminaire à toute réflexion et toute proposition. Il semble qu’une fois de plus, on se réfugie dans un monde parallèle et médiatique pour se complaire dans l’autosatisfaction. En France, on aime bien mettre le paquet sur des mesures dont on devine qu’elles sont inutiles ou contre-productives pour dire ensuite qu’on a investi comme jamais mais que ça n’a pas marché. D’une part, ça justifie les salaires mirobolants de ceux qui les promeuvent et d’autre part, ça permet de couper court aux reproches qui ne manqueront pas de pleuvoir quand on ne pourra plus cacher les manque de résultats. En l’occurrence, on part du postulat que si les élèves sont en difficulté, c’est qu’ils n’ont pas acquis certaines bases, certaines connaissances. La faute à qui ? Il suffirait donc de convoquer les enseignants 10 jours avant la rentrée pour qu’ils pallient ce qu’ils n’ont pas réussi à transmettre pendant 10 mois. Qui peut croire que la cause de l’échec scolaire doit être assumée par les seuls professeurs et qu’il suffirait de quelques heures supplémentaires, sur le temps de vacances, pour y remédier ! Le Président Macron a surpris son monde, quelques mois après son élection, en réussissant, pendant les grandes vacances, à dédoubler des classes dans certains établissements. Que n’a-t-il continué ! Une des solutions passe par la réduction des effectifs d’élèves dans les classes. C’est la clé pour permettre à l’enseignant de passer du temps avec un ou deux élèves, ou avec un petit groupe, pendant que les autres sont occupés scolairement bien sûr. Forcément ça coûte, quand la politique, depuis le Traité de Maastricht, consiste à « faire des économies ». Donc, quelle que soit la réforme, le dispositif, il faudra investir, en matériel, en personnel. Ou alors, il faudra trouver une astuce, bien démagogique, comme écourter les vacances des enseignants (ils sont tout le temps en vacances, n’est-ce pas) et les mettre au boulot avant la rentrée. Entre l’école qui finit le 10 juillet et recommence le 20 août, il ne restera pas beaucoup d’avantages pour compenser l’indigence des salaires des profs. Déjà qu’on peine à en recruter.

Une mesure vouée à l’échec ? Il ne faut jamais parier sur le pire. Ça pourrait marcher dans la mesure où, fin août, nombre d’enfants, d’ados, s’ennuient. Beaucoup de structures sont fermées, comme les médiathèques municipales, les stades et clubs sportifs. Par conséquent, ils pourraient voir d’un bon œil la perspective de retourner au collège ; pour retrouver leurs copains… C’est peut-être ce qui assurera la réussite de cet énième dispositif.

effel - école 2Un mot sur les autres mesures phares, annoncée par les médias. D’abord, le retour à l’enseignement chronologique de l’Histoire. On remarquera que, depuis Mitterrand, cette matière tient à cœur les Présidents de la République. La chronologie, ce sera peut-être (ça dépend comment on s’y prend), l’occasion de rappeler que la France est un vieux pays qui n’est pas apparu un peu avant la naissance des parents des élèves. Les enfants de familles étrangères, contrairement à ce qu’on pense, sont demandeurs et curieux de connaître les événements marquants du passé et les traditions de leur pays. Peut-être plus encore que les autres, ils éprouvent de la fierté de grandir dans un vieux pays qui a connu une longue évolution jusqu’à ces jours où ils bénéficient d’un enseignement accessible à tous, même imparfait. Ensuite, l’étude d’un texte par semaine. Fort bien ! D’abord, comment se fait-il que ce soit nouveau ? Pendant des décennies, les élèves lisaient, essayaient de comprendre, en classe, des textes, souvent d’auteurs classiques, guidés par leurs professeurs. Ils apprenaient à lire entre les lignes, à déceler les allusions, à connaître les références. Ça fait des lustres que les professeurs du secondaire sont déjà bien aise quand ils lisent sans difficulté. Ensuite, il faudrait aussi que le temps consacré aux humanités ne soit pas parasité par des activités en apparence scolaires, mais qui ne permettent pas de prendre du temps pour les explications de textes. Enfin, il faut voir de quels textes on parle. L’introduction de la littérature de jeunesse au collège a porté un coup à l’acquisition d’une culture générale, seule condition pour exercer des responsabilités d’adulte. C’est autant de temps où l’on n’apprend pas à réfléchir. C’est sans doute pour ça que ça a été décidé mais parier sur le bêtise n’a jamais été gagnant à terme. Le rôle du pédagogue n’a jamais consisté à fournir un prêt-à-penser mais à façonner les outils pour penser par soi-même, avec l’acquisition de méthodes.

 

 

 

 

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