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101e km
6 juillet 2021

Europe 1 balloté sur la grève

Les bouleversements viendront d’Europe1 qui vient de vivre sa première grande grève depuis 1974, date à laquelle le Premier Ministre Chirac avait débarqué le directeur de son siège rue François-1er. Ça se passait comme ça à l’époque. Aujourd'hui, la censure ne vient plus du politique mais du financier et de plus en plus du particulier, via les fameux réseaux sociaux qui fonctionnent comme des tribunaux populaires dont on connaît la pondération et l’objectivité.

Ce qui est amusant dans cette histoire, vient d’Inter où M. Demorand s’est payé le luxe, lundi 21 juin de dire quelque chose comme : Merci aux auditeurs qui nous rejoignent, il est 8 heures ! Ça faisait suite à une chanson parodique qui se moquait de M. Bolloré. D’habitude, c’est sur Europe 1 qu’on entend l’animateur de la matinale souhaiter la « bienvenue aux auditeurs qui nous rejoignent aujourd’hui ». Il ne fallait pas rater ça mais le moins qu’on puisse dire, c’est que la grève dans la station, désormais sise au front de Seine, n’a pas été beaucoup suivie. Sans doute les salariés de la radio généraliste privée ont-ils eu peur de monter dans la charrette qui permettrait à la direction de tailler dans l’effectif sans coup férir. Fin de la grève, donc, le mercredi 23 juin à la mi-journée après que l’intersyndicale a obtenu l’ouverture de négociations en vue d’obtenir la clause de conscience pour ceux des journalistes qui le souhaitent. Avec cette clause dite de conscience, unique au monde, un journaliste peut quitter son employeur, arguant du fait qu’il n’est plus d’accord avec lui tout en obtenant un minimum d’indemnités. Autrement dit, ça fait pas lourd. Raison de plus pour saluer le courage de M. Philippe Vandel qui a décidé de passer des disques (chose rare sur E1 comme sur Inter), avançant qu’il n’avait pas la possibilité de réaliser sa prestation habituelle en direct, ni de la préparer. Or, M. Vandel figure sur la liste des producteurs reconduits à la rentrée. On n’a peut-être pas assez prêté attention à une expression qu’il emploie désormais pour éviter les répétitions lorsqu’il évoque C-News ( la chaîne d’infos tv qui sera couplée avec E1). Il parle de « la chaîne d’opinion du groupe Canal+ ». Tout est dit et bien dit. Chapeau M. Vandel !

Le mouvement a été soutenu par 50 anciennes voix d’Europe1. Fort bien ! Nous avons déjà expliqué comment cette station puisait sa légitimité en entretenant le souvenir des années prestigieuses où sa rédaction était une référence nationale. En perte de vitesse, on a multiplié, dans un passé récent, « Les grandes voix d’Europe1 » sous forme d’intervention, de débat, d’émission à part entière. Ça permettait aussi à ceux qui n’ont plus rien à dire de revenir le dire encore une fois. Cette fois, ce sont des voix critiques qui mettent en avant leur notoriété, notamment à l’époque où ils faisaient une audience après laquelle la direction actuelle court en vain. Néanmoins, ça confirme ce que nous disions, à savoir que la radio est un média de vieux et que si l’on veut perdurer en attirant les jeunes, il faut trouver des solutions. En fait, ce qui gêne les salariés du front de Seine, ce n’est pas tant de se « rapprocher » d’une chaîne d’information continue mais que la dite chaîne soit devenue, ainsi que l’a mentionné M. Vandel, un média d’opinion. Il est bien évident que chaque journaliste a la sienne qu’il exprime plus ou moins. Néanmoins, officiellement, il affiche une certaine neutralité. Il est tout aussi évident qu’une rédaction financée par un groupe industriel (Lagardère, Bouygues, Bolloré, LVMH) sera favorable à l’économie de marché la plus dérégulée possible et aux personnalités politiques qui la défendent. On sait où l’on met les pieds et l’auditeur aussi. De là à véhiculer des propos polémiques, il y a un pas que tous les journalistes ne sont pas prêts à sauter.

L’objectivité nous oblige à reconnaître que si les auditeurs d’Inter n’ont pas moufté quand la publicité de marques a envahi l’antenne, si les auditeurs attendent impatiemment le bouffon de service qui clôt la matinale, les téléspectateurs apprécient qu’une chaîne de télévision diffuse chaque soir des discours polémiques avec ce que ça suppose de réactions et d’opposition. « Écoutez le monde changer » est le slogan d’Europe1. Il est dommage que son personnel ne s’applique pas cette devise et ne se rende pas compte des changements de la société. Les réseaux sociaux ont banalisé les commérages où l’objectivité n’a plus de place, pas plus que l’argumentation. La vérité n’est plus qu’une opinion parmi les rumeurs et les croyances. C-News taille des croupières à BFM-TV qui, dans sa course à l’audience, a été vivement critiquée pendant les attentats puis pendant les émeutes des gilets-jaunes. C-News, en pleine restructuration à l’époque, apparaît comme exempte et en quelque sorte comme la voix de l’opposition. Il ne serait pas surprenant que sur les créneaux qui seront commun à E1 et C-News, l’audience remonte sensiblement et que la radio poursuive les chamailleries avec les auditeurs (comme font certaines stations) le reste de la matinée. On notera que sur l’antenne concurrent dite de service public, la chroniqueuse Sophia Aram a évoqué le mouvement de grève. Elle a donc asséné sa leçon de morale hebdomadaire en orientant sa défense d’une « radio de moins en moins concurrente mais néanmoins amie » sur le polémiste Zemmour sur lequel beaucoup semblent faire une fixation.

wendy bouchard

C’est dans ce climat d’incertitude que M. Matthieu Belliard a fait des adieux tonitruants et applaudis à l’antenne. On ne peut pourtant pas dire qu’il ait marqué son passage au cours de ces deux saisons d’animation de la matinale. Anne Roumanoff aura tenu autant. En revanche, Mme Wendy Bouchard qui animait la tranche d’information de 18-20 a exposé longuement aussi son passage à Europe 1 mais n’a pu retenir son émotion à la fin où elle a été applaudie à deux reprises. C’est bien beau d’applaudir et c’est le lot de tous les producteurs de médias qui sont en contrats à durée déterminée, reconduits ou pas, mais compte-tenu des circonstances, ses confrères auraient pu soutenir les animateurs, chroniqueurs et journalistes priés d’aller voir ailleurs. Outre les noms cités, M. Bertrand Chameroy est aussi remercié et d’autres sont sur la sellette. Mme Pascale Clark a appris son départ avec tristesse dit-elle. Elle non plus n’aura pas vraiment convaincu avec sa « balade avec » qui s’est rapidement transformée en entrevue traditionnelle avec une personnalité du monde de la culture. Mme Clark s’est toujours présentée comme un parangon de vertu, n’hésitant pas à tacler M. Stéphane Bern, coupable selon elle de se prêter à des publicités. Elle-même avait travaillé sur une radio où la publicité est omniprésente. Après l’échec de sa reconversion dans un site consacré à des reportages sonores, elle est revenue (probablement sur recommandation de son ami de toujours M. Patrick Cohen) sur une autre radio commerciale en même temps que M. Bern, d’ailleurs. Ne nous soucions pas de son sort car on la retrouvera certainement sur Inter à la rentrée où l’on n’hésitera pas à faire gicler quelqu’un pour lui faire de la place. Contrairement aux autres années, on ne sait rien des grilles des radios généralistes (est-il utile de préciser vu que les autres n’ont pas de grille pour passer des pubs et des variétés) pour la saison prochaine.

 

 

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