Le plaisir de tuer plus fort que tout
Le plaisir de tuer est plus fort que tout et plus fort que la covid 19 qui est la grande affaire du moment, sur laquelle, on dirait que ni les scientifiques, ni surtout les politiques n’ont de prise.
Alors même qu’Arles se trouve en zone rouge, que quasiment tous les rassemblements festifs, culturels et même sportifs ont été annulés en France depuis le printemps et tout au cours de l’été, la Féria du riz aura lieu. On va donc tuer des taureaux après les avoir épuisés en souffrances devant 4 000 personnes qui se seront arrachées leurs tickets d’entée. À ce stade, on peut penser que le massacre aurait pu tout aussi bien se dérouler devant une centaine de personnes voire à huis-clos, comme les tournois de tennis et même les derniers matches de la Ligue des Champions. Pourtant, par définition, le spectacle n’existe que s’il y a des spectateurs. Il faut croire qu’on a dépassé cette logique simple et qu’il faut que ça se fasse coûte que coûte !
Pour le reste – zone rouge oblige – les mesures sanitaires seront appliquées strictement : il n’y aura pas de fête dans les rues, pas de danses, pas de concerts, rien que des taureaux tués puisque ça se déroulera en intérieur. Ici, on bascule dans la logique commune aux tueurs d’animaux : dans l’espace privé, on fait ce qu’on veut et donc, on peut tirer sur des espèces protégées, maltraiter des animaux puisque on est entre soi et qu’on a payé pour ça.
Comme il n’y a pas de limite à l’absurdité, il faut encore lire les arguments de la maire adjointe : « On doit être exemplaire et on le sera ». C’est la tendance du moment. On peut tout se permettre du moment qu’on porte le sacro-saint masque, même mal mis, mais usagé et donc inefficace. En d’autres termes, on tuera des taureaux pour rien et même trois fois rien (12 000 / 3 = 4 000) mais toutes les mesures sont prises pour être inattaquable. Allusion à la polémique sur « Le Puy-du-Fou » où l’on avait critiqué la dérogation au plafond de 5 000 spectateurs. Comme on sait le sujet de la corrida sensible, on prévient que tout se passera bien, sauf pour les animaux bien entendu. Pourtant, le maire lui-même reconnaît : « Elle n’aura de féria que le nom » mais on tuera quand même des taureaux. Le journal Le Provençal titre sur « Une féria responsable », responsable du massacre de bêtes pourtant reconnues sensibles, donc souffrant. Souffrant pour le plaisir de 4 000 spectateurs assoiffés de sang et jouissant de voir souffrir. Un logo « féria responsable » a même été créé pour montrer le sens des responsabilités de la Mairie et des organisateurs. Notons au passage l’ineptie de l’égalitarisme à la française qui impose les mêmes règles pour tous quelles que soient les circonstances. Pas plus de 5 000 spectateurs sur un même lieu. Le Stade de France qui contient 80 000 places en plein air n’a pas le droit d’accueillir plus, exactement comme le stade municipal d’Amiens qui n’en contient que 12 000, justement la capacité des arènes romaines d’Arles. Comme, visiblement, dans cette histoire, on ne compte pas, on apprend que des renforts de police seront appelés pour contrôler le port du masque : police municipale renforcée par une société privée mais également police nationale. Il faut croire que la police n’a rien de mieux à faire que de s’assurer du port du masque dans les rues d’Arles et à l’entrée des arènes afin qu’on ne puisse pas dire qu’il y a eu du relâchement à l’occasion de la Féria du riz et que les visiteurs ont pu ramener le virus chez eux.
Les médias (France Bleu, France 3 (service public), RTL, Le Provençal) traitent l’événement comme un banal concours de pétanque, comme si l’on n’allait pas tuer pour rien. France Info TV traite l’événement dans la rubrique « Culture » avec les livres de la rentrée et le rap… Service public payé par notre redevance. À partir du moment où c’est culturel, aucune critique n’est admise puisqu’il en va de la liberté de création. Fermez le ban !
et sur le masque