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101e km
14 juillet 2020

France Inter : la musique par défaut

Il n’est pas anodin de trouver la musique en dernier dans la présentation de la station dite de service-public, à savoir Inter (en gros car il y a longtemps aussi qu’elle ne s’adresse plus à toute la France), après l’info, la culture et l’humour. Il y aurait beaucoup à dire aussi sur l’humour et nous y reviendrons peut-être bientôt mais en attendant, intéressons-nous à la musique. Il se trouve que depuis le début de la grille d’été, Inter nous gratifie, tous les soirs, 7 jours sur 7 donc, d’un concert ou d’extraits de concerts. Seulement, on comprend que c’est contrainte et forcée que la radio diffuse ou rediffuse ces concerts, faute d’avoir pu instaurer des programmes d’été, avec des émissions comme on l’entend sur le « service-public », à savoir l’animateur et « mon invité aujourd’hui ». le reste du temps, la musique sert surtout à boucher les trous malgré une programmation rigide de laquelle on a du mal à échapper. Fini le temps où « mon invité » pouvait demander à entendre un disque ou même, lorsque c’était un chanteur, on passait de préférence ses chansons. Maintenant, dans ces cas-là, on écoute un extrait et l’on demande à « mon invité » de commenter l’extrait. Faut-il remercier la covid 19 pour nous permettre d’entendre, tous les soirs, de la bonne musique ; bonne musique parce que le choix convient ou non selon ses goûts. Ça s’appelle « Le Festival Imaginaire » et il est paradoxal que l’antenne qui est noyautée par des soixante-huitards ou de plus jeunes dans leur lignée aient oubliée l’imagination au pouvoir au point de la considérer comme un pis-aller. C’est bien d’entendre de la musique, des morceaux avec une orchestration originale pour le public, sans la publicité pour une banque qui se prétend encore mutuelle et d’avoir l’impression d’y être car, très souvent, quand on y est, on ne voit pas mieux que si l’on était devant son poste de radio tant il y a du monde et qu’on ne s’est pas mis en frais pour le public.

 

discoTous les soirs, donc, un concert et l’on est surpris quand on entend la date. Parfois, c’était un concert d’il y a un peu moins de dix ans et l’on a l’impression qu’il a été enregistré l’an dernier. Ainsi, celui d’un certain Nile Rodgers que ma culture éclectique ignorait pourtant. Malheureusement, mes occupations estivales ne m’ont pas permis de l’écouter en entier mais quelle n’a pas été ma surprise en entendant le premier morceau « Upside down ». Ah ? C’est donc lui qui a fait ça. J’avais compris dans la présentation de M. Matthieu Conquet qu’il a formé le groupe Chic pour lequel je n’avais aucune attirance. Chic, c’était le disco et je déteste le disco. Il se trouve que ce genre a commencé alors que j’étais militaire et je remarquais des similitudes entre le disco et la musique militaire car, dans les deux cas, on n’entend que la grosse caisse sur laquelle il faut taper le plus fort possible et, pour le public, effectuer un mouvement du talon gauche. Un type comme Cerrone s’était fait connaître en tapant un peu plus fort que les autres malgré quelques mélodies pas toutes désagréables. Alors, cette vague disco où les morceaux s’enchaînaient sans qu’on s’en aperçoive, n’était pas pour moi. Il y avait bien quelques exceptions mais dans l’ensemble, c’était assez mauvais. Pourtant, comme tout le monde, j’avais la faiblesse d’en apprécier quelques uns sans qu’il y ait une raison objective. Je me souviens surtout de ces discussions âpres pour savoir si tel groupe était encore « rock » ou était tombé dans la soupe du disco. Moi, j’étais intéressé par ce qu’on appelait à l’époque la « new wave » (le terme est repris à chaque nouvelle vague) et tous ceux qu’elle a drainés comme Ian Dury, Elvis Costello, Little Bob Story, The Clash, Blondie, Kraftwerk et même Plastic Bertrand sans oublier Patti Smith qui n’en était pas mais s’est fait connaître dans ces années-là. En fait, je formais mon goût en écoutant « Feed Back » de Bernard Lenoir qui, à l’époque, était encore ouvert à plusieurs styles. Heureusement, il y avait le reggae qui nous réconciliait tous. À l’époque, tout le monde a compris que c’était une lame de fond et que le mouvement serait irréversible. En France, on a vu les vedettes locales se lancer dans le disco et le public a fait mieux que suivre. Disco, c’est trop ! Mais impossible d’y échapper. Très vite, le disco s’est insinué dans toutes les musiques si l’on voulait gagner sa vie. Les meilleurs ont intégré une batterie un peu plus forte que nécessaire. En France, des groupes avaient trouvé l’astuce d’une simple boite à rythme. Il faut reconnaître que ça plaît. Alors, le groupe Chic et son « Freak out ! Le freak, c’est Chic » – en français dans le texte – ça n’était pas ma tasse de thé. Par conséquent, malgré un très agréable « Upside down », aucune raison de rester près du poste écouter son concert de 2013 au cours de Jazz à Vienne.

https://www.franceinter.fr/emissions/jazz-et-musique-du-monde/jazz-et-musique-du-monde-12-juillet-2020

 

Eh bien, j’ai eu tort car lorsque je suis revenu, c’était le moment d’interpréter « Spacer ». Là, j’avoue que ce morceau, avec l’introduction bien connue mais une orchestration nouvelle, ça devient de la très bonne musique. « Let’s dance » ? C’était donc lui aussi. Mais alors, c’est un génie ! Ce mec a signé, comme auteur-compositeur ou comme producteur, les plus grands succès depuis quarante ans. Le concert se termine en apothéose avec « Good times » et même « Freak Out » m’est apparu mieux que supportable en appréciant l’inventivité des arrangements. On aurait voulu que ça ne cesse pas. En fait, pour la scène contemporaine, Nile Rodgers a effacé un peu l’obsédante batterie et adopté un tempo un peu plus funky du meilleur effet et il reste le meilleur, la musique.

Nile Rodgers

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J
La disco, ce sont des gens comme Jacques Morali et Henri Belolo qui en ont été, non pas les promoteurs, mais les inventeurs autour de 1975. Il existait avant ça, aux États-Unis, des groupes et des formations orchestrales (MFSB, Salsoul, Love Unlimited Orchestra...) qui produisaient une musique de danse que l'on rangeait dans les bacs étiquetés soul music, funk. La soul music avait elle-même évolué au tout début des années 1970, au lendemain du festival Wattstax (*), vers des formats plus courts et plus dansants ciblant le public blanc. L'incontournable émission Soul Train, programmée entre 1971 et 2006, s'est faite l'écho et le témoin de cette évolution de la soul vers une funk sophistiquée et dansante, puis plus près de nous vers le hip-hop et cette variante contemporaine du rhythm'n'blues, de la soul et du hip-hop appelée RnB... via la période disco dont on dira qu'elle s'est étendue de 1975 à 1983. C'est cette musique instrumentale et cette soul dansante produite dès 1972, programmée dans les boîtes et sur les radios européennes, particulièrement en Italie, au Royaume-Uni et en Allemagne où elle était très populaire, qui a inspiré le courant disco. <br /> <br /> <br /> <br /> Outre cette fameuse rythmique binaire qui semble te coller des boutons, Sumac, la disco adopte des lignes de basse syncopée et surtout, se distingue de la musique de danse qui existait jusqu'alors, dérivée du rock et du jazz, par des orchestrations léchées et des variations quelquefois subtiles et recherchées jouant sur les contrepoints, contrechants, crescendi, decrescendi de cordes et de sections de cuivres, enrichies de sections rythmiques laissant la part belle aux percussions, sur des plages excédant quelquefois les vingt-cinq minutes couvrant chaque face d'un vinyle. <br /> <br /> <br /> <br /> Le compositeur Alec Costandinos avait assuré la partie orchestrale des premiers disques de Jean-Marc Cerrone, lequel avait souhaité enrichir sa musique du son de cordes de Barry White, qui était ce qui se faisait de mieux à l'époque. Cerrone était batteur à la base, Barry White était un musicien en partie autodidacte qui fredonnait chaque partition de l'orchestre sur un magnétophone, lesquelles étaient reprises par un certain Gene Page, compositeur et orchestrateur de génie dont les envolées et les harmoniques ont séduit de très nombreux artistes de cet âge d'or, bien au-delà de la musique soul puisque Gene Page a collaboré entre autres avec Elton John. <br /> <br /> <br /> <br /> Je m'attarde sur Barry White non seulement parce qu'il est mon artiste de prédilection, mais aussi parce qu'il a été l'un des premiers aux États-Unis à s'engouffrer dans la vague disco, le temps d'un album (The Man, 1978). Son challenger Isaac Hayes en a consacré deux, Diana Ross, l'une des divas de la soul des années 60, a laissé quelques standards disco qui sont aujourd'hui abondamment remixés et samplés. Le guitariste George Benson y est venu plus tard, avec son "Give me the Night". Bref, ce qui inspira la disco au départ sacrifia à son tour à la disco, jusqu'à ce que ce courant abandonne peu à peu les cordes et les cuivres après le succès de la musique du film "Midnight Express", composée par Giorgio Moroder, pour un son plus électro qui préfigurait la house, évolution de la disco plus confidentielle, plus orientée night-clubs que diffusion radio. La disco disons plus ludique a évolué vers une funk sophistiquée (Earth Wind and Fire), souvent teintée de jazz et inventive (George Benson, Incognito, Deodato). <br /> <br /> <br /> <br /> Outre le tandem Morali et Belolo, qui a créé et produit les groupes Village People et The Ritchie Family, on pourrait citer aussi le britannique Pete Bellotte, qui avec Giogio Moroder a produit Donna Summer, Janet Jackson, Tina Turner, Shalamar, Cliff Richard, Melba Moore et The Three Degrees, trio de choristes qui accompagnait l'importante formation de Philadelphie MFSB, trente instrumentistes dirigés et produits par Kenneth Gamble, Leon Huff et Thom Bell, dont le son a marqué l'histoire de la soul puisque cette formation a enregistré en studio, et ses produite en concert avec des groupes aussi prestigieux que les O'Jays, Harold Melvin and the Bluenotes, The Stylistics, The Spinners, Wilson Pickett... <br /> <br /> <br /> <br /> Juste pour dire que la petite histoire de la disco ne se résume pas à quelques hits de circonstance de Dalida et Patrick Juvet. C'est une musique que j'apprécie, que j'écoute encore, que l'on redécouvre aujourd'hui et que j'aime à produire. <br /> <br /> <br /> <br /> (*) Le Woodstock noir, commémorant le 20 août 1972 le septième anniversaire des émeutes raciales de Watts, ghetto noir de Los Angeles. Isaac Hayes (Shaft) y prit part ainsi que Kim Weston, The Staple Singers, The Dramatics, The Bar-Kays, Rufus Thomas...
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