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101e km
28 août 2022

Inter : été en musique, rentrée surréaliste !

Un été s’achève sur la grille d’Inter, un été 2022 plutôt agréable avec plein de musique, notamment le soir avec des retransmissions de concerts populaires, la vie pas toujours passionnante de chanteurs déjà âgés (E. Daho) ou très âgés (Françoise Hardy, Véronique Sanson, Bernard Lavilliers), « La radio de... » qui a permis à un chanteur (dont encore Lavilliers) de proposer son choix musical. Oui, on a beaucoup entendu Lavilliers, car il y a eu aussi un concert et de toute évidence, il est entré dans le cercle des chanteurs de référence, des témoins qu’il y a eu et qu’il y a encore une bonne chanson française, avec des textes, des musiques originales et des engagements. Piaf, Ferré, Ferrat, Aznavour, Trenet,Higelin, Brassens, Brel, Barbara, Béart, sont loin à présent et l’on voit ceux qui restent, plus jeunes mais portant les cheveux blancs depuis déjà pas mal. Un été de rediffusions aussi avec les « Affaires sensibles » à heure de grande écoute, l’histoire avec Philippe Colin, les « Rendez-vous avec X » en début d’après-midi. Ça pose un problème, bien sûr, car il n’y a quasiment plus de création mais d’un autre côté, la radio n’intéresse plus que par défaut. En plus, c’est bien pour ceux qui ne peuvent pas écouter ces émissions en direct ou qui ont envie de les réécouter au calme. Bien sûr, il y a l’Audio À la Demande (dit « podcast » en bon français) mais c’est pas pareil. On a eu également le plaisir d’entendre, dans la matinale, une vraie séquence pour l’été avec M. Thomas Croisière qui proposait « Un voyage en comédie » où il s’est attelé à un florilège des comédies cinématographiques, à succès ou qui ont marqué leur époque. Chaque émission est ficelée au millimètre avec l’illustration musicale adéquate, sans perdre une seconde. Sourires au rendez-vous, rappels de chansons entêtantes. Un vrai succès qui montre que la distraction peut aussi avoir sa place sur Inter et dans une tranche d’information, sans céder au tir sur les ambulances et à la satire militante.

 

L’été présente une particularité sur Inter, c’est que depuis des lustres à présent, il existe des émissions qu’on retrouve tous les ans : émissions recalées le reste du temps ou émissions qui ont fait leur preuves ou sont parrainées. Donc, « Le débat de midi », toujours inégal mais ça dépend du sujet et de l’invité. « Mon invité », c’est décidément la marque de fabrique de la maison ronde. Pas une émission sans « mon invité », qq soit le format, qq soit le projet de départ, qq soit l’heure même. Ainsi, « Un été avec Platon » devait nous proposer un divertissement philosophique. L’animateur, prof de philo voulait montrer l’acuité de sa discipline, son intérêt pour traiter les sujets les plus variés et les plus actuels, citations à l’appui. Sauf que, très vite, on a retrouvé les vieux démons. Bien sûr, tous les jours, il y a un invité mais assez rapidement, il est passé de témoin à utile bavard. « Merci [mon invité] d’être venu nous présenter votre album. Nous allons en parler ». Idem avec M. Claude Askolovitch, qui voulait revenir sur les histoires et les aventures extraordinaires qu’il avait découvertes en faisant sa revue de presse, avec reportages et portraits sur place et qui est vite retourné dans le studio pour recevoir « mon invité » , dont sa propre mère pour lui faire raconter sa déportation. Plus rien à voir avec le projet de l’émission. Et c’est comme ça qu’on refait sempiternellement la même chose qq soit l’heure ou l’animateur. « Mon invité » vient faire sa promo ou simplement faire plaisir à l’animateur qui peut ainsi discuter avec son chanteur préféré ou une autre personnalité. Pourquoi passer du temps sur moins d’une heure d’émission, le matin, en été ? Tout simplement pour souligner le manque total d’imagination en matière radiophonique. De temps en temps, on a quelqu’un comme Émilie Blon Metzinger qui de 16 h à 17 h proposait des chansons et dont le talent consistait à les présenter au mieux pour mettre l’artiste en valeur et retenir l’auditeur ; ce qu’elle a fait sur fip pendant des années.Normalement, ça devrait surtout être ça, la radio et ça mettrait en lumière la création ; singulièrement absente depuis des décennies. En fait, sans doute pour respecter un obligation de cahier des charges, la création s’est réalisée dans le cadre de la coopération des radios publiques francophones avec notamment cette série à la fois sérieuse (présence d’intellectuels) et divertissantes pour garder le ton de l’été, sur les 7 péchés capitaux et même un 8e, probablement la meilleure. De philo, il en a aussi été question avec ce curieux rendez-vous avec Jankélévitch qui arrive avant le journal de 8 heures, comme un cheveu sur la soupe. Jankélévitch est-il à ce point méconnu qu’il faille montrer qu’à travers les vicissitudes de l’Histoire, il avait toujours raison ?

 

Alexis Morel ©Radio France - Christophe Abramowitz (2)L’information était aussi en vacances avec des voix inhabituelles aux créneaux principaux. « Le téléphone sonne » a jonglé entre l’actualité et des sujets plus en lien avec l’été. C’est ça que la direction d’Inter s’ingénie à ne pas comprendre : il y a des auditeurs de l’autre côté du studio. Ainsi pour le dernier dimanche d’août, dernier matin au calme pour la plupart des Français, quoi de mieux que de rediffuser un reportage sur le drame des fausses-couches. Les samedis et dimanches ou pendant l’été, ils ont envie aussi de se sentir en vacances, de sentir que ce n’est pas le train-train de la semaine, surtout s’ils font partie de ceux qui ne peuvent pas partir ou qui n’ont pas d’activité. Ça devrait être ça la notion de service public dont on nous rebat les oreilles : apporter un petit plus à la vie des auditeurs exclus du système, par l’âge, le chômage, le manque de moyens pour des loisirs. Leur apporter ce à quoi ils n’ont pas accès. Aujourd'hui, pour être informé, il y a des chaînes d’info en continu dont France-Info, France 24. Pour l’humour, il y a des radios et pour la soupe musicale, ça ne manque pas, entre 2 plages de publicités. La radio qui se dit à l’envi de « service public », devrait d’abord se préoccuper de l’auditeur. L’information c’est, depuis des lustres aussi, d’abord la matinale, peut-être le seul moment de la journée où l’on écoute encore la radio comme depuis toujours. Au micro, selon les semaines, les jours et leurs vacances légales, se sont succédé avec succès : Mmes Hélène Fily, Marion L'hour, Christelle Rebière et MM. Jérôme Cadet, nouveau joker de la station et Alexis Morel. Un mot sur lui car il incarne ce que devrait être un journaliste qui présente une session d’information. Tout y est : bonne humeur communicative, rigueur professionnelle et sobriété, mot qui est désormais à la mode. Avec M. Morel, pas de sorties intempestive, pas d’effet ni de facilités langagières. Au contraire, on a le plaisir d’entendre une expression simple mais correcte, sans liaisons appuyées, sans céder aux modes du moment. C’est devenu rare, dans tous les domaines, toutes les profession, d’avoir affaire à quelqu’un qui s’exprime bien, tout simplement. En plus, il mène le « grand débat » du matin de main de maître, sans délayer son sujet, sans tirer l’entrevue dans un délayage pour tenir la demi-heure et en donnant la parole aux auditeurs. En plus, il ne déborde pas sur l’horaire alors que chacun sait que le matin, la radio sert aussi de pendule aux auditeurs qui partent travailler ou vont faire garder les enfants. Souhaitons (mais sans illusion) que la nouvelle direction lui confie davantage de missions lors de la prochaine saison.

 

À la fin de la dernière semaine du « 6-9 de l’été », on a pu entendre une annonce tout à fait surréaliste. Pour rappeler le retour à la normale et à la grille de la nouvelle saison, voici que les présentateurs titulaires de la matinale nous annoncent leur retour en insistant sur l’arrivée d’un « nouveau » en la présence d’un humoriste, en l’occurrence Mathieu Noël : « Pour se moquer de l’actualité… et un peu de nous aussi ». On marche sur la tête ! Nous rebattre les oreilles avec la notion de service public, avec « un vrai travail de journaliste » qu’on ne manque jamais non plus de rappeler, pour finalement embaucher un bouffon pour s’en moquer. À une époque, le slogan de France-Inter était : « Pour ceux qui ont quelque chose entre les oreilles ». Maintenant, on se demande si tout le monde à la rédaction a bien une tête sur les épaule.

Après « mon invité », c’est peut-être ça aussi le défaut majeur de cette station qui nous martèle sa mission de « service public » : l’humour. À croire qu’Inter veuille concurrencer Rires & Chansons (mais sans chanson) car c’est toujours ce qui est mis en avant. On pourrait croire que pour attirer l’auditeur dans une session d’information, on promouvrait la qualité des experts, l’organisation et la hiérarchisation des nouvelles. Non, c’est l’humour qui doit faire toute la différence. 2 minutes qui seront souvent 3 minutes juste avant le principal journal et qui vont écraser tout ce qui a été dit avant et le sommaire du journal. Et l’on remet ça une heure plus tard avec en alternance, l’histrion de service ou la moralisatrice engagée. Finalement, on est comme dans Lucky Luke où alternent les références historiques, les débuts des grands journaux, les foules sur la place publique et les personnages comiques ainsi que la caricature des ligues de vertu.

Il faut donc imaginer qu’à un moment, 2 ou 3 personnes ont été mobilisées pour chercher puis recruter un humoriste, qu’elles ont passé du temps à lire, écouter leurs prestations puis ont fait leur choix avant de retenir celui qui va intégrer l’équipe de la matinale. Intégrer puisque pour les auditeurs comme pour beaucoup de gens de la maison ronde, il n’y a pas de différence entre les journalistes salariés, les soutiers et les chroniqueurs extérieurs. On se souviendra que Sophia Aram traitait Mme Audrey Pulvar (qui officiait dans la pré matinale) de « notre petite consœur », comme s’il pouvait y avoir un quelconque nivellement entre elles. Donc, on retiendra que ce qui compte le plus dans la prochaine tranche d’information, prolongée, c’est l’arrivée d’un plaisantin. Comme on change de directrice, on aura sans doute aussi un nouvel indicatif. Il faudrait compter combien il y en a eu depuis la création de France-Inter.

 

 

 

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