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101e km
6 avril 2021

La France remplit des flacons

Depuis quelques mois, on constate que la France est le seul membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU à n’avoir pas produit de vaccin contre la covid 19. Pis, il n’en a même jamais été question et aucune étude n’a été financée en ce sens. De toute manière l’Institut Pasteur n’en a pas les moyens et Sanofi vient de verser un dividende en hausse après que le bénéfice net du groupe a progressé de près de 340% en un an. De quoi financer la Recherche & Développement, de quoi réagir à cette terrible pandémie mais le capitalisme à la française rappelle que la finalité de la libre entreprise est d’abord de réaliser des bénéfices.

https://www.ledividende.fr/2021/02/action-SANOFI-dividende-exercice-2020.html

https://www.francetvinfo.fr/economie/industrie/sanofi-propose-un-dividende-en-hausse-apres-une-envolee-de-son-benefice-net-annuel_4284719.html

Посещение_пункта_вакцинации_от_COVID-19_(СPar conséquent, Sanofi se contente de remplir des flacons d’un produit fabriqué par d’autres ; et encore a-t-il fallu lui tirer un peu l’oreille car l’entreprise aurait pu se passer d’une tâche qui ne rapporte guère. Voilà donc le visage de la France à l’aune de la pandémie, une ancienne puissance reléguée au rôle de sous-traitant, de simple exécutant aux ordres. Qui plus est, la France ne parvient même pas à vacciner sa population (sans parler de ceux qui sont contre). À côté de ça, les pays habitués à regimber, comme la Chine, la Russie et même Cuba, se paient le luxe d’en envoyer à prix coûtant aux pays les plus pauvres ; on devrait plutôt dire les pays où la richesse est dérobée par une poignée d’individus bien protégés par leur armée.

Pourtant, il y a quelques décennies seulement, outre l’Institut Pasteur, la France pouvait compter sur un secteur privé à la pointe de la recherche pharmaceutique. Elle comptait, parmi ses fleurons, Institut Mérieux, Roussel-UCLAF, Rhône-Poulenc et même Sanofi-Synthélabo, filiale du groupe d’État ELF. Tous ces groupes étaient cotés à la Bourse de Paris et avaient leurs principales usines au sud de Lyon, au point que cette partie de l’axe rhodanien était surnommé « le couloir de la chimie ». Que sont-ils devenus aujourd'hui ? Par le jeu des privatisations, le capital de ces entreprises a été dilué, dispersé. Par idéologie, on ne pouvait tolérer que « l’État fabrique du dentifrice » ; telle était la caricature pour faire approuver les privatisations. Il valait (valet?) sans doute mieux acheter son dentifrice, produit de première nécessité, à l’étranger. C’est chose faite désormais et pas seulement la pâte pour l’hygiène buccale mais la plupart des médicaments courants et ne parlons pas de ceux, plus pointus, pour des pathologies particulières. Autre facteur qui a contribué à la disparition de fait de ces groupes pharmaceutiques, l’idée, très en vogue il y a quelques décennies, selon laquelle l’économie moderne pouvait reposer entièrement sur le tertiaire (les services) et abandonner le secondaire (l’industrie) et le primaire (l’agriculture). La montée de l’informatique faisait espérer un monde reposant entièrement sur l’échange de données et le commerce. Encore faut-il avoir quelque chose à commercer.

 

Voici ce que nous écrivions il y a deux ans et demi :

Parmi les nouveautés introduites au tout début des années 1970 sur la radio de l’État, appelée aujourd’hui, radio de service public, il y avait la bourse de Paris. À l’époque, ça prenait 5 minutes juste avant le journal de 13 heures. C’était un certain Jean-Pierre Gaillard qui s’en chargeait. Jean-Pierre Gaillard, les Français l’ont découvert quand il a intégré une chaîne de télévision d’information continue et qu’il a été caricaturé par les Guignols de l’info. Il était alors près de la retraite… Ça montre bien qu’on n’existe pas tant qu’on montre pas sa gueule à l’écran. Que disait-il, Jean-Pierre Gaillard ? Il citait des noms et des formules tout à fait hétéroclites et même occultes.

Voici une liste non exhaustive de ce qu’on pouvait entendre :

Screenshot_2021-04-06 Ancienne boîte ASPIRINE Usines du RHÔNE Specia UPR en carton En vente sur Delcampe

- Poclain

- Lafarge

- Péchiney – Ugine-Kuhlmann

- Saint-Gobain – Pont-à-Mousson

- Usinor - Dunkerque

- elf-Aquitaine

- Roussel-UCLAF

- Rhône-Poulenc

- Machines Bull

- la Française des Pétroles (CFP)

- CIT- Alcatel

- Denain –Nord-Ouest

- Les Hauts-fourneaux de la Chiers

- la Lyonnaise des Eaux

- la Redoute à Roubaix

- Schlumberger

- Chantiers de l’Atlantique

- Penarroya

 

et quelques étrangères comme

- Royal Dutch

- BASF

- Bayer

 

De ces noms français, il n’en reste plus guère et quand ils subsistent, c’est sous une autre forme. Saint-Gobain et Pont-à-Mousson se sont séparés, par exemple. La plupart des autres ont été absorbés par la concurrence ou ont disparu corps et biens.

Toutes ces grandes entreprises devaient leur prospérité à deux facteurs. D’une part, la dynamique de la reconstruction de la France après la guerre et le boum démographique. D’autre part, au plan qui coordonnait la politique industrielle de la France et lui assurait son indépendance. Moyennant quoi, la France fabriquait tout ce dont elle avait besoin, à plus petite échelle, souvent de meilleure qualité mais pouvait ainsi faire face aux aléas des alliances et des conflits. On était en pleine guerre froide.

 

Aujourd’hui, via le géant General Electric, les États-Unis sont en mesure de contrôler et de bloquer à tout moment l’approvisionnement de la France en énergie. La branche de construction électrique d’Alstom a été cédée à GE qui a ainsi tout pouvoir sur des éléments essentiels des centrales nucléaires. Or, la France dépend à près de 80 % de cette source d’énergie. Il est très facile pour les États-Unis de paralyser la France, par exemple si elle décidait de ne pas rejoindre une coalition militaire contre un ennemi de la superpuissance ou si elle jugeait qu’un accord commercial lui serait défavorable. La politique menée depuis la signature de l’Acte unique en 1992 vise à aligner la France sur les autres membres de l’UE et en faire l’équivalent de la Hongrie, par exemple, pour « en finir avec le modèle français ». Toutes ces régressions amènent toujours plus de chômage par le biais des fusions et des délocalisations. Qu’on se souvienne que, lors de la signature du Traité de Maastricht, on nous avait annoncé la création de milliers d’emplois à l’échelle européenne de l’époque. On nous a refait le même coup lors de l’intégration de dix pays en même temps puis lors de la création de l’euro. On voit le résultat puisqu’on sait que les pays qui annoncent quasiment le plein-emploi recourent à des dispositifs de calcul qui masquent la précarité.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2018/12/07/36925967.html

 

En d’autres termes, un grand pays comme la France se trouve à la merci du bon vouloir des groupes pharmaceutiques étrangers. On voit dans les négociations avec l’UE, que les labos profitent de leur avantage mais finalement, pas tant que ça. Ils le pourraient et décider de la vie ou de la mort d’une population entière. La souveraineté n’est pas un vain mot ni une idéologie qui tente de percer en réaction à une mondialisation qui promettait d’être heureuse et de faire de la planète un village global. On voit depuis le début que c’est plutôt une jungle sans autre loi que celle du plus fort. À ce petit jeu, la France n’a plus les moyens de faire face à une crise et peut-être même d’assurer l’autonomie dans des secteurs vitaux comme la défense, la santé, l’éducation voire l’alimentation.

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